Midnight hearts de Marie HJ

by Gwen

Titre Midnight hearts

Auteur Marie HJ

Date de sortie 4 mai 2022

Un titre à commander ici Midnight hearts

 

Quelques semaines après avoir succombé au charme de Midnight dancer (la chronique est ici https://melimelodegwen.fr/midnight-dancer-de-marie-hj/ le podcast ici pocast Midnight dancer), me voici de retour avec l’aîné des frères Ashton, Rhys pour un roman qui m’a, une fois de plus, bouleversée par son intensité et ses thématiques.

Remarque préliminaire. Cette chronique ne contient en principe pas de spoils. Cependant, il peut être fait allusion à des événements de Midnight dancer que je vous conseille donc de lire d’abord -sans compter qu’il FAUT avoir lu ce titre, comme tous ceux de Marie d’ailleurs.

Une fois cette mise au point faite, revenons au beau Rhys autour de minuit, l’heure où

Hier s’est enfui, demain va bientôt éclore, et aujourd’hui n’existe pas

Il y a douze ans, alors adolescent à qui l’on colle dans les pattes son petit frère, Rhys a eu un moment d’absence, le temps de checker trois mains et de s’acheter des clopes. Pas de quoi changer la face du monde, pensez-vous? En théorie, vous avez raison. Mais où le monde suit-il les théories raisonnables?

La suite, si vous avez lu Midnight dancer, vous la connaissez, sinon, sachez que la décision de Rhys a eu des conséquences terribles, dont il ne se relève pas vraiment, douze ans plus tard, malgré l’image qu’il renvoie au monde.

Rongé d’une culpabilité doublée de tonnes de mauvais choix, Rhys est un personnage double-face. Pour ses parents, il est un garçon un peu sauvage, très indépendant, qui a su passer la transition vers l’âge adulte. Pour Jordan, le meilleur ami de son frère Cameron, il est un enfoiré à cause de qui toute leur vie a volé en éclats.

Pour lui … pour Rhys, difficile de peindre un portrait sans ombres ni flous, un portrait qui sorte des nuances du gris coupable au noir malheur en passant par le béton tristesse et le blanc vide de tout pardon.

Depuis sa terrible erreur, il semblerait qu’il n’ait fait que ça, enchaîner les erreurs et les décisions mauvaises. Sur le moment, elles ont contribué à sa survie, peut-être, mais à long terme, elles ont creusé des ornières dont il est presque impossible de sortir.

À plus forte raison quand le jeune homme, persuadé qu’il n’a droit à aucune rédemption, s’enfonce inexorablement dans son désespoir tout en maintenant les apparences. Et personne ne voit au-delà de sa façade du beau gosse, barman et réalisateur de cocktails au Pasadena.

Le seul qui semble voir à travers sa carapace, de loin en loin, c’est son meilleur ennemi, son pire cauchemar, Jordan Thomas. Celui qui, du haut de ses douze ans, lui a craché toute sa haine et sa rancœur là où chacun faisait mine d’ignorer son besoin de contrition. Celui qui recueille les mots et les confidences de Cameron là où seul le silence lui répond. Celui qui le rend assez vivant pour répondre pique à pique.

Jordan était là ce fameux lundi où tout a basculé. Il aurait voulu que son meilleur ami monte avec lui dans ce bus au lieu d’attendre son crétin de frangin. Il a cru que tout redeviendrait comme avant. Depuis, il avance, à son rythme. À neuf ans, il voulait être jardinier, à dix, footballeur, à douze, il se rêvait super-héros ou avocat. Il y a de ça dans son parcours, -ni le jardinier, ni le footballeur, encore moins le danseur pitié- celui d’un étudiant en droit avec un module de criminologie et un mémoire de fin d’études consacré aux disparitions inexpliquées.

Et tant pis si l’insupportable Rhys Ashton le regarde comme un intrus, comme un indésirable, comme le fils que ses parents auraient aimé avoir, comme celui qui, quelque part, éclaire ses propres zones d’ombre.

Entre l’obscurité et la lumière, les désirs et la déraison, les deux hommes s’aimantent autant qu’ils se repoussent, s’équilibrent autant qu’ils se fragilisent dans un tableau à la lumière crue et aux lignes heurtées, une fresque toute en angles et en rupture, une peinture aux mille couleurs du désespoir et de la reconstruction.

Dire que j’ai aimé ce Midnight hearts ne rendrait pas hommage ni à son contenu, ni à son autrice.

Dès le premier chapitre, je savais que mon cœur n’en sortirait pas indemne. J’ai assisté, navrée, à la descente aux enfers de Rhys. J’en ai même, un peu, voulu à son entourage de ne rien voir, avant de me projeter un instant -pas plus, après j’ai été prise de bouffées de stress- à leur place. Quand toute l’énergie est mobilisée dans un insignifiant espoir et la nécessité d’avancée, on ne voit plus forcément ce qu’il y a sous ses yeux, à moins qu’il soit trop difficile de trouver les mots, de réconforter celui qui reste.

La rencontre avec la famille Dorothy fournit d’ailleurs un éclairage et une explication aussi vivaces que poignants qui donnent à ce roman un relief particulier.

Le parti pris de Marie HJ dans ce roman est original et puissant. Dans Dancer, on parlait du sort des survivants. Ici, on se consacre à l’entourage. J’avoue que je n’avais pas imaginé la situation de leur point de vue. Pourtant, il est capital et développe des sentiments puissants et bien plus nuancés que je ne l’aurais imaginé de prime abord.

La situation de Rhys est décrite avec force et brutalité. L’autrice n’édulcore pas ses ressentis, de la même façon que les chapitres de son point de vue sont bruts de son honnêteté et de son dégoût de lui-même.

La mise en abîme que lui impose Jordan, en le forçant à revenir sur son passé, est à la fois une torture et une expiation.

Et je ne parle même pas des fantômes de son passé qui s’accrochent à ses pieds pour le tirer vers le fond alors qu’il tente de garder la tête hors de l’eau.

Mais dans cet avis, j’ai oublié l’un des aspects majeurs de ce roman. C’est une romance. Une romance façon Marie HJ, une de celles qui serre le bide, qui frustre et donne envie de donner deux trois taloches derrière la tête aux personnages pour leur remettre les idées en place et les forcer à accepter leur droit au bonheur.

Je ne veux pas vous en dire trop pour ne pas gâcher le plaisir, mais j’ai aimé le cheminement des personnages entre le refus de l’évidence et l’évidence du refus. J »ai fondu pour les angoisses de l’un pour les doutes de l’autre, pour la maladresse des deux et pour un séjour initiatique où les libellules ont virevolté au creux de mon estomac.

J’ai craqué enfin pour le parcours de Marie HJ qui, une nouvelle fois, rend possible l’impensable sans se départir d’une logique implacable.

Vous l’aurez compris, si vous recherchez une romance frustrante et bouillante, une histoire d’amour de soi et d’amour de l’autre, un roman où les sentiments brûlent, dévastent et apaisent, alors rendez-vous à minuit, pour cette merveilleuse leçon de vie:

Peu importe que l’on chute, que l’on se plante, que l’on pleure ou que l’on rie. Peu importe si le ciel tourne à l’orage trop souvent ou que le soleil brille à nous en griller la rétine. Peu importe que l’on aime, que l’on déteste, que l’on prie ou que l’on n’y croie plus. Peu importe si on change, ou si on décide de rester le même. Peu importe les gens qui passent et s’oublient, ceux qui restent en tête même s’ils sont partis, ou ceux à qui on choisit de s’accrocher. Peu importe les joies, les peines et les douleurs. Les rêves et les cauchemars. Les espoirs et les doutes. Peu importe. Parce qu’il y a une chose que j’ai compris. Quoi qu’il se passe, où que l’on aille, une chose reste immuable : la vie continue. Le jour se lève toujours. Même quand plus rien n’a de sens, cette promesse, elle, ne changera jamais.

Un mantra à relire et à méditer souvent pour se souvenir que Minuit passe toujours, promesse d’une nouvelle aube, d’un nouveau jour, d’un nouvel avenir … et du prochain coup de cœur signé Marie HJ

 

 

vous aimerez aussi

N'hésitez pas à me laisser un petit commentaire