Titre À crocs à la lune tome 2/2
Auteur Lydia Walther
Éditeur Plumes du Web
Date de sortie 12 Août 2021
Un titre à commander ici A crocs à la lune tome 2
Avertissement pour ceux qui n’auraient pas encore lu le premier volume (et c’est un tort 😉 ) cette chronique risque de vous dévoiler des éléments. Attention aux spoils!
Quelques mois après avoir découvert la charmante ville de Georgetown (pour retrouver la chronique, c’est ici https://melimelodegwen.fr/a-crocs-a-la-lune-de-lydoa-walther/ ), dans l’univers sens dessus dessous de Shainey.
Pensez plutôt! Au terme d’un suspense haletant, l’adolescente s’était retrouvée nez à truffe avec sa mère et tout aussitôt renvoyée du domicile familial.
Dès lors, pour notre belle en phase d’auto-apprivoisement, il ne reste plus guère de solution.
Errer seule, au risque de servir de proie aux chasseurs de la région? à son créateur?
Ou accepter l’offre de l’Alpha Aaron Rivera et intégrer sa meute.
Si Shainey écoute la voix de la raison, ce n’est pas pour autant que la raison l’habite toujours.
Dans ce deuxième volume, elle doit faire face à trop de menaces pour vivre sereinement sa transition.
Dans la meute d’abord, son intégration ne fait pas l’unanimité, à commencer par Ramon et Melissa qui ne perdent pas une occasion de lui rappeler leur désapprobation. Et même si elle peut compter sur l’amitié réconfortante de Flavie, de Matt, d’Eliott et la tendresse de Korey, difficile de se sentir à son aise, surtout lorsque Tom, l’électron libre, fait souffler le chaud et le froid et que l’adolescente se rend compte qu’elle a troqué une règle pour d’autres.
Mais dans une meute où tout est codifié, hors de question de n’en faire qu’à sa tête. L’Alpha est bien plus impressionnant qu’un parent en colère et la soumission de tous, bêtas et à plus forte raison omega n’est pas négociable. Il en va de l’autorité du chef et de la sûreté de chacun.
Car à l’extérieur, la menace gronde, sourde et grandissante. Elle prend les traits d’un policier zélé qui ne relâche pas ses investigations. Elle se complexifie avec différentes mesures qui font des loups une cible de choix. Elle devient oppressante lorsque Molitor, le louvetier engagé par l’Etat entame une lutte à mort en usant de tous les stratagèmes, même les plus vils.
On frémit beaucoup dans ce dernier volet. On se demande, assez souvent, qui du traqueur ou du loup mérite le mieux le titre de bête.
Au milieu de ces périls, il ne faut pas oublier que Shainey n’a toujours pas résolu son dilemme de base. Qui est son créateur?
Il peut encore se lier à elle, la marquer, la tuer, mais, selon les légendes, il peut aussi la « guérir » de sa lycanthropie. Tellement de bonnes raisons pour retrouver cette bête que personne ne semble capable de localiser ou même d’identifier.
Vous l’aurez compris, ce deuxième volet regorge de bonnes raisons pour passer un très bon moment de lecture.
J’en ai beaucoup aimé l »intrigue, pleine de suspense. Si Shainey est à la recherche de son créateur, il ne faut pas oublier que les loups sont aussi les proies des chasseurs. Cette double quête rend l’atmosphère souvent oppressante, d’autant que l’autrice ne recule devant rien pour malmener ses lecteurs, y compris des rebondissements que je n’attendais pas et à l’efficacité certaine.
Plus qu’une intrigue qui tirerait vers le polar, on assiste à une sorte de course contre la montre où personne n’est à l’abri et où tous les coups peuvent être décisifs.
Ensuite, j’ai été très touchée par une histoire pleine de sentiments. Bien entendu, on y parle d’amour mais aussi de ses contrariétés et j’ai fini par me demander si Shainey trouverait loup à son pelage. Pour autant, la romance, quoi que présente -et très touchante- ne prend pas le dessus sur tout le reste de l’histoire, ni sur les autres sentiments qui relient nos personnages. En effet, Lydia Walther traite de l’affection sous toutes ses formes, fraternelle, amicale, familiale, que l’on parle de la famille de cœur ou de sang. Elle montre aussi que parfois, les familles qu’on se crée sont aussi aimantes que celles dont on hérite à la naissance. Tant d’affection fait du bien, même si elle peut aussi être synonyme de souffrance quand la vie s’emballe et emprunte des voies sombres.
Même dans ces moments, il y a dans ce roman un vrai message de fraternité et de tolérance. Accepter les différences -d’espèces, mais on pourrait l’adapter à tellement d’autres domaines- ce n’est pas toujours simple. Ça peut être effrayant. Le premier réflexe peut être la fuite, le rejet, la mise à distance. Mais lorsqu’on parvient à surmonter ces écueils, on gagne des amitiés à vie, indestructibles et d’une richesse rare. Qu’il s’agisse de Mitchy, de Jake ou de Melissa, chacun des personnages qui croise la route de Shainey doit se positionner et j’ai trouvé les choix de l’autrice très crédibles. J’ai adoré le message qu’ils transmettent, de l’amitié plus forte que les différences et de la richesse que sont des amis.
Dans un contexte où l’on ne sait pas à qui se fier, c’est un aspect qui fait du bien.
J’ai aussi aimé, plus encore que dans le premier volet, que cette histoire soit aussi un roman d’initiation et d’émancipation vers l’âge adulte. Si je suis très attachée au personnage de Shainey, je n’ai pu m’empêcher d’être parfois agacée de son côté rebelle. Et puis je me suis souvenue. Que c’est une toute jeune femme qui, jusque là a à la fois dû gérer de lourdes responsabilités comme l’éducation par interim de ses cadets, mais qui, en même temps, a fonctionné avec peu de repères d’autorité parentale.
Dans la meute, c’est presque l’inverse. C’est elle la novice, celle qu’il faut préserver de tous, en premier d’elle-même. Cette prise en charge n’est pas chose aisée quand on a eu l’habitude inverse. Parallèlement, cette fois, il y a en face un adulte, et quel adulte. Un alpha à l’autorité incontestable. Quoi que j’aie souvent trouvé Aaron d’une grande patience, il n’empêche qu’il dicte sa loi à Shainey, et que ce n’est pas sans heurts.
Le passage à l’âge adulte et à son émancipation, ce n’est pas l’anarchie, mais d’autres règles, celles qui impliquant la protection du plus grand nombre. C’est un joli message. Par peur d’en écrire trop, je ne dirai pas tous ces moments forts que traverse l’héroïne et qui fondent la future femme ou la future louve en elle, mais là encore, le regard de Lydia Walther est très juste. La psychologie du personnage et son évolution sont étudiées avec soin et le rendu est des plus convaincants.
En comparaison, et c’est un tout petit bémol, j’aurais adoré passer un peu de temps dans la tête de Korey pour comprendre non pas sa ligne de conduite, elle est très claire, mais la façon dont il parvient à s’y tenir.
En tout cas, la galerie des personnages est complexe. Sous la plume pleine de tolérance de Lydia Walther, rares sont les personnages à être unanimement mauvais. Ce sens de la nuance est aussi touchant que finement pensé.
Enfin, là encore sans en dire trop, j’ai beaucoup apprécié la morale finale de cette histoire. Elle complète cette impression de bienveillance et de tolérance qui sous-tend tout le roman. Une histoire à dévorer sans modération donc, pour la qualité de l’écriture et des personnages, pour l’équilibre entre action et introspection et pour l’optimisme que j’en ai retiré.