Titre Un printemps renversant Denbora tome3
Auteur Rose J Kalaka
Date de sortie 16 juin 2021
Un titre à découvrir ici Denbora 3 un printemps renversant
Pour cette dernière escale au Pays basque, cette troisième saison dans la douce atmosphère d’Anglet, Rose J Kalaka nous a réservé une romance à la saveur doucement acidulée des romances qui n’ont rien de l’évidence.
Ça a été le cas pour tous les duos que cette série a mis en scène, mais le binôme Elorri/ Iñigo déplace le curseur encore un peu plus loin.
Elle pense ne plus avoir d’avenir amoureux, après la perte de son grand amour. Sa vie, ce sont ses deux fils, des bouilles d’amour à croquer malgré leurs propres doutes et leur épuisante énergie ainsi que sa boutique. Si le retour de son amie Anaé lui rouvre des perspectives, rien ne la prédispose à poser de nouveau ses yeux sur un homme.
De l’amour, Iñigo ne connaît rien ou presque. Marqué par un passé dont on a découvert une esquisse au volume précédent, il pense ne rien mériter et n’avoir rien à apporter aux autres. Pourtant, tout au long de l’histoire, tout ce qu’on apprend sur cet homme hurle le contraire.
Entre ces deux écorchés de la vie, la rencontre est aussi improbable qu’imparable et offre à cette jolie série une fin des plus réussies!
Si le destin semble destiné à placer sur la même route le commis de cuisine et l’entrepreneuse, c’est dans la salle du restaurant de Sorospen que la rencontre se produit, imprévue et pourtant imparable.
Nos deux amputés de l’amour se découvrent en un clin d’œil comme s’ils s’étaient toujours connus.
Le coup de foudre?
Il y a quelque chose de ça, mais pourtant, on en est loin.
Si l’attraction apparaît, puissante et évidente, lame de fond qui balaie les certitudes et réveille les corps, il y a trop de doutes pour les deux personnages.
Pour Elorri il y a, bien sûr, tout ce que le mystérieux commis éveille chez elle alors que, en dépit des conseils de Madeleine, son ancienne belle-mère, elle pensait avoir tiré un trait sur les hommes. Aucune envie, aucune tentation et un impératif, préserver Ekaitz et Urko, ses fils, si différents mais si complémentaires. Ils peuplent sa vie, occupent son temps et le cocon qu’elle a construit pour eux ne souffre pas d’intrusion intempestive.
Pourtant, j’ai aimé la façon dont Elorri fait face. On sent que c’est un tempérament que cette battante cultive comme un art de vivre. Quand on découvre la jeune femme plus en détail, on comprendrait qu’elle s’apitoie sur son sort, au lieu de quoi, elle prend les situations à bras le corps en faisant de son mieux pour masquer ses doutes, ses peurs, ses blessures.
Est-elle pour autant capable d’endiguer ceux de l’homme qu’elle a dans le viseur?
Car question doutes, Iñigo est bien loti. Son démarrage dans la vie a été des plus chaotiques. Il ne sait pas ce que c’est que de donner et de recevoir de l’amour. La confiance, il ne l’accorde pas, ou alors à quelques personnes triées sur le volet comme ce patron qui lui a donné une chance sans préjugés.
Pire, il est persuadé que ses erreurs passées le poursuivent. Pourtant, il a quitté la région où il vivait pour recommencer une nouvelle vie dans la région de ses racines. Mais est-ce suffisant?
Surtout, que dira-t-on d’un rapprochement avec la trop séduisante veuve qui fait battre son cœur? Peut-il l’exposer aux regards en coin, aux médisances? Et qu’en est-il de ses fils. Saura-t-il faire une place auprès d’eux sans effacer l’absent?
J’ai aimé ce personnage pour ses failles. Tout ce que l’on sait de son présent en fait un homme bien, et mieux que ça, qui veut rendre les opportunités qu’il a reçues comme une dette envers la vie. Les thèmes abordés en filigrane par l’auteur sont poignants et ils m’ont touchée.
Pourtant, un doute taraude et paralyse Iñigo. Est-il assez bien pour ce nouveau destin qui, peut-être entrouvre une porte?
Dans ses instants de doute, pourtant légitimes, j’ai souvent eu envie de le secouer, de lui montrer le chemin parcouru plutôt que les fossés qui frôlent la route comme un indicible vertige, si loin et pourtant si sensibles au jeune homme pétri de doutes.
Ce roman est une réussite parce qu’il couronne la délicatesse de Rose J Kalaka qui crée des histoires du quotidien, simples et complexes comme la vie elle-même. Rien d’extravagant ni d’incohérent dans cette histoire aux parfums de seconde chance et de reconstruction, mais la beauté simple d’une vie « normale » où chacun doit composer avec ses peurs souvent inavouées et les maladresses qu’elles occasionnent.
J’ai beaucoup aimé les enfants. La fraîcheur d’Urko, vite conquis, contraste avec la réserve d’Ekaitz. Ce dernier est très réussi. La réflexion qui se développe autour de lui est fine; elle m’a prise au cœur notamment lors d’une certaine discussion au cadre particulier.
J’ai aussi été touchée par Madeleine, l’ex belle-mère d’Elorri. Quoi que les relations soient complexes entre les deux femmes -là aussi, les discussions à cœur ouvert valent le détour- j’ai aimé son altruisme, son attachement et son implication dans la vie de ses petits-fils et aussi de sa bru. J’ai aimé qu’elle soit nuancée, à la fois rigide sur certains points, mais capable de réfléchir et de nuancer.
Ensuite, j’ai aimé croiser, de plus ou moins près, les personnages qui ont peuplé mon aventure basque. Les six amoureux de ces trois saisons sont tous des êtres fêlés, à la recherche d’un bonheur contrariant. Ils sont des hommes et des femmes déterminés, capables de soutenir l’autre lorsqu’il flanche.
Ils sont aussi des passionnés, sains, investis, des personnes que l’on aimerait avoir comme amies.
Ils sont enfin, à l’image de leur autrice, plein de cœur et de chaleur, des amis difficiles à perdre de vue, même quand il est temps de laisser chacun poursuivre sa route.
À moins que, qui sait, lors d’un crochet au pays basque …
Une idée que je pose là, en toute innocence. Quoique!