Titre Kalliopée 1/3 le sacrifice d’une princesse
Auteur Koko Nhan
Éditeur Black Ink Éditions
Date de sortie 12 novembre 2021
Un titre à commander ici Kalliopée 1/3 ou à commander sur le site de l’éditeur là https://blackinkeditions.com/product/kalliopee-t1/
Pour la paix, elle est prête à tous les sacrifices … il n’en faudra pas moins pour parvenir à ses fins.
Bienvenue dans une dystopie singulière et terriblement réussie signée Koko Nhan pour Black ink éditions.
Une dystopie qui parle d’amour, de différences et de droits, qui parle de vengeance et de justice, de morale et d’engagement. Bref une histoire qui va vous malmener le cœur. Et vous connaissez la meilleure? Vous allez adorer ça!
Suite à un passé des plus dévastateurs, les hommes ont divisé le monde en cinq territoires, cinq peuples aux différentes spécificités, Aquaria, Lapisia, Viridia, Nivisia et Liberisia. Ces peuples, l’Union des cinq, vivent en bonne intelligence depuis des siècles, en accord sur le principal, en particulier la place des femmes.
Autant le dire tout de suite, elle n’a rien d’enviable. La femme célibataire est tenue à l’écart de toute décision importante. La femme mariée doit obéissance totale à son mari et elle est son équilibre. Juste reconnaissance de son influence occulte, pensez-vous? Que nenni. Elles sont l’équilibre à ses fautes. Un homme vole, c’est la main de sa femme qu’on coupe. Il tue, c’est elle qui est exécutée en réparation. Vous voyez le topo?
Il n’y a pas à dire, l’autrice nous entraîne dans un monde qui vend du rêve. D’autant qu’il y a très peu de façons d’échapper à cette condition. Fille de médecin particulièrement douée ou princesse de sang royal, même destin, servir, se taire, enfanter … oh et se taire bien sûr.
Je ne suis pas tout à fait juste. Il y a un petit plus à être fille de roi. Non seulement on ne peut pas vraiment se mélanger aux autres, on ne peut pas non plus régner -ben non, puisqu’on est femme! mais on peut se marier et même plus servir de trait d’union à un traité de paix.
En effet, depuis des années, Viridiens et Lapisiens sont en guerre. Une guerre sanglante et monstrueuse qui menace l’union des Cinq et tellement d’hommes, d’enfants et de femmes également.
Et si un mariage pouvait arranger ça, comme dans les anciens temps. Ça tombe bien! Lapisia compte un prince, le valeureux Karel Edark, fils du roi Xerios. C’est un guerrier inflexible, un homme souvent mené par ses passions. Il est aussi loyal, à ses frères d’armes, Jamaël, Hrin, Zaïn et Jonah, à Vali qui a été leur formateur et au souvenir de la mystérieuse adolescente à qui il a donné son cœur jadis.
Mais si le devoir dicté par son père lui impose de prendre pour épouse la princese Kalliopée Talae de Viridia, il s’inclinera. Peu importe qu’il préfère vivre avec n’importe qui d’autre, à commencer par Xintia sa maîtresse en titre. Peu importe qu’on présente sa promise comme un monstre, une abomination, une sorcière!
Ce mariage est politique. Et vu les lois des royaumes, le sort de la princesse n’a rien d’enviable.
Pourtant, Kalliopée accepte ce mariage, ce sacrifice, avant tout pour épargner le peuple.
Sans compter qu’elle a, elle, un avantage sur le prince, en tout cas le croit-elle. Elle en sait beaucoup sur Karel. Bien plus qu’il ne le suppose.
Kalliopée, consciente de ses devoirs, sait que rien ne sera facile dans sa nouvelle vie. Mais avait-elle vraiment anticipé ce qui l’attendait?
Princesse d’un royaume haï dans sa nouvelle patrie, elle ne peut compter sur aucun soutien -ou presque. Le roi lui est hostile, tout comme le prince qui prend un plaisir affirmé à piétiner ses espoirs et ses tentatives d’alliance.
En dehors d’une poignée d’alliés, tout n’est que haine, mépris, défiance et humiliation.
À moins que …
J’ai beaucoup aimé ce premier volet de la trilogie signée Koko Nhan. Il pose tout d’abord une intrigue riche, en résout certains nœuds, en laisse d’autres -et visiblement pas des moindres- en suspens.
Il dépeint un univers à la fois imaginaire et pourtant totalement identifiable. Les différences y sont honnies, l’étranger y est rejeté.
Fort heureusement, la place des femmes est plus enviable « en vrai » dans une grande partie des pays du monde, mais à l’instar d’une Servante écarlate, la réflexion sur la place des femmes restreinte à portion congrue, poussée très loin dans cette dystopie en est aussi glaçante que passionnante.
Impliquée dans ce qui la touche, rebelle mais réfléchie, Kalliopée pourrait avoir un grand destin si elle était née homme. Être femme lui permettra-t-il tout de même de se faire une place de choix? Rien n’est moins sûr. Pourtant, la jeune femme est des plus méritantes.
Son sens du devoir est admirable. J’ai aimé la façon dont elle s’implique totalement pour le bien-être d’un peuple qui, pourtant, ne lui voue que haine et mépris, sans penser aux conséquences.
C’est aussi un personnage très attachant par sa façon de ployer sous le poids de la solitude, du chagrin, du désespoir, mais de toujours trouver la force de se relever. Si je l’ai trouvée parfois trop téméraire, c’est ce trait de caractère que j’admire, tout comme sa capacité à tenir tête aux hommes, du moins tant qu’elle le peut encore.
Sa sensibilité forme un très beau pendant à cette force mentale. Elle me l’a rendue d’autant plus chère. J’ai aimé que Kalliopée ne soit pas que solidité et détermination. j’ai aimé qu’elle doute. J’ai aimé qu’elle flanche, parce que cette fragilité rend chaque victoire encore plus belle.
S’il fallait une autre raison d’aimer la jeune fille si spéciale, je dirais que la façon dont cette nouvelle vie l’éveille est également très réussie. C’est assurément une héroïne qu’on a hâte de retrouver et de suivre sur ce chemin accidenté.
J’ai aimé, en opposition, le personnage de Karel. Il n’est que force là où Kalliopée est douceur, passion brute là où elle est tempérance, colère là où elle est bienveillance.
« Vous n’aimeriez pas voir celui que je suis vraiment », déclare-t-il un jour. C’est à la fois très vrai et totalement faux. Effectivement, j’ai été soufflée par les moments où il décroche, où il perd le contrôle, même si j’ai pu en comprendre les causes sinon les motivations. Mais j’ai tout autant perdu le souffle lorsque lui perdait de vue sa haine et sa résolution, lorsqu’il se faisait plus hésitant ou qu’il acceptait de laisser un peu de place dans son cœur pour des sentiments autres que la haine, la rage et la vengeance.
Pour autant, Karel non plus n’est pas un homme simple. Sa haine semble inextinguible et pourtant, des yeux vairons, qui dédoublent les sentiments et les renforcent, lui font souvent perdre pied. Sa soumission aux desseins de son père paraît incontestable, mais le prince sait que, tôt ou tard, elle le mettra dans une situation intenable. Tout au long de ce premier volume, on le sent tenté de secouer le joug paternel. La suite de l’histoire pourrait bien lui en donner des motifs.
Ce roman est une histoire de passions, de la haine au désir, de la vengeance à la revanche, de l’égoïsme à la bienveillance. Il montre des évolutions dans tous ces sentiments qui m’a tenue en haleine.
C’est aussi une histoire de devoirs. Chacun des personnages, quelle que soit sa position, ne peut y échapper, tout au plus tenter de s’en accommoder et d’assouplir un peu son cadre.
Dans le contexte où s’achève ce premier tome, bien malin celui qui pourra prédire ce qui, du devoir ou de la passion, de la raison ou des sentiments, prendra le dessus.
Pour ma part, raison et sentiments sont tombés d’accord. Il me faut la suite. Très vite!