(In)destructible de Manon Donaldson

by Gwen

Titre (In)destructible

Auteur Manon Donaldson

Editeur Black ink éditions

Date de sortie 21 octobre 2022

Un titre à commander ici (In)destructible

Connaissez-vous les frères Parks? Drake, Trey et Mason? Oui? Alors vous allez adorer ce volume consacré à Trey. Non? Je dois vous faire une confidence, je ne les connaissais pas non plus avant de commencer cette lecture. Oui oui j’avoue mon crime, je n’ai pas attaqué cette saga familiale dans l’ordre.

Rassurez-vous, le talent de Manon Donaldson fait que vous ne serez pas perdus dans l’intrigue. Par contre vous risquez de vous spoiler un peu l’histoire de l’un des frères -ou vous retrouver, comme moi, dévorée de curiosité pour son destin-.

En attendant, occupons-nous de Trey, tatoueur de son état, homme fêlé d’un passé dysfonctionnel, bousillé par une mère comme on n’en souhaiterait pas à son pire ennemi, sérial fucker incapable d’accorder sa confiance ou son affection.

Pris sous l’aile de Garon qui lui a appris le métier et une certaine forme d’affection voire de confiance en son prochain, Trey est désormais prêt à voler de ses propres ailes. Il n’a pas vraiment le choix, à dire vrai et se retrouve l’heureux propriétaire du Blood’ink, épaulé par Sandy, autre âme écorchée à qui Garon a accordé une seconde chance.

Amis comme chien et chat, protecteurs comme frère et sœur, ils forment un duo en vue d’Alaina Beach en Floride. Ils connaissent tout le monde et tout le monde les connaît, qu’il s’agisse de Maxine au poste de police, de Sasha dans leur bar favori ou de Bastien et sa clique, les mauvais garçons du lieu, protégés par l’aura nébuleuse d’un père flic aux méthodes douteuses.

Aussi une nouvelle arrivée dans ce petit univers ne peut qu’être repérable. À plus forte raison quand la nouvelle en question vit dans la pension de famille de la secte locale où elle dépare. À bien y réfléchir elle dépare tout autant sur la jetée où elle vend ses dessins pour quelques dollars, le temps de réunir un pécule suffisant pour partir.

Peut-on avoir un coup de foudre sur une simple œuvre? Si l’on en croit la réaction de Trey, on peut le parier. Rien n’est pourtant gagné.

Il refuse de s’engager. Hors de question pour elle de se laisser approcher, encore moins par un homme, encore moins par CET homme dont la réputation n’est plus à faire et qui parle un peu trop à tout ce qu’elle tient à garder sous contrôle.

Il veut la séduire. Habituellement, il n’a aucun mal pour y parvenir. Mais Athena déjoue toutes ses habitudes. Elle est indépendante, capable de le renvoyer dans les cordes d’une simple phrase. Elle semble hermétique à son charme –quoique- et surtout, elle mène sa vie comme si elle devait disparaître à chaque instant.

Naît alors une lutte à la vie à l’amour au rythme trépidant des aventures en sursis, avec un slowburn terriblement frustrant qui vous fera hurler “vengeance” à des heures indues. Avec le décalage horaire, je ne sais pas si ça compte.

Mais par-delà cette romance explosive, sensuelle, capable de réchauffer n’importe quel hiver québécois, (In)destructible est aussi une histoire qui m’a fait frémir pour bien des raisons.

Elle se déroule dans un univers que j’aime particulièrement, celui du tatouage. Dans le roman, ce n’est pas un simple élément du décor. J’ai plongé tête baissée dans les pages qui évoquaient cet art, celui du dessin aussi bien que de l’encrage. On y trouve de la passion pour cette discipline, un sens de la description très abouti.  Si je pousse très bientôt les portes de mon salon favori, ce roman y aura certainement sa part de responsabilité.

Elles tiennent d’abord à la personnalité de ses protagonistes. Il est toujours délicat d’entrer dans une histoire par un spin-off. Pourtant, le talent narratif de Manon Donaldson rend la chose plutôt aisée.

Elle distille les éléments nécessaires pour comprendre le décor, suffisants pour mourir d’envie de découvrir le premier opus de la série des Parks sans perdre les nouveaux venus.

Elle dresse des portraits forts de personnages plus fragiles qu’ils ne veulent bien le reconnaître. Pour Athéna comme pour Trey, la faiblesse n’est pas une option. Il a perdu son protecteur et peut à tout instant voir fondre sur lui des périls sérieux, qu’il s’agisse de sa mère ou du flic ripou du secteur.

Il tente de garder à flot une relation fraternelle vacillante en s’interdisant d’ouvrir la porte sur les secrets qui, peut-être, donneraient à chacun les explications nécessaires. Il est ainsi, préférant assumer la haine et la colère que de reconnaître qu’il est avant tout un être humain avec ses faiblesses, un ancien enfant qui a agi avec ses maigres armes pour préserver ceux auxquels il tient plus que tout sans savoir le leur dire autrement que par des insultes et des provocations.

Il semble blasé, revenu de tout, incapable de prendre soin des autres. Pourtant, il est exactement le contraire et j’ai adoré le découvrir ainsi, faible sous sa force, mis à terre par des sentiments auxquels il ne croyait pas, dépouillé de toute sa superbe pour les beaux yeux de sa mystérieuse.

Il faut dire qu’Athéna, question mystère …

Le personnage brouille les pistes, égraine malgré elle des bribes d’informations qui laissent entrevoir les zones d’ombre qui planent au-dessus d’elle. L’instabilité de sa situation, le sentiment d’urgence qu’elle fait planer en font un personnage intense. J’ai aimé la voir lutter contre les sentiments qu’elle refuse mais qui s’insinuent. J’ai beaucoup apprécié ses levers de boucliers aux élans sanguinaires.

J’ai été touchée qu’elle refuse, même après avoir baissé la garde, de devenir une “petite chose fragile”. Pourtant, elle aurait mille raisons de céder à la tentation de la faiblesse, d’en laisser un autre prendre soin d’elle. Mais non, elle reste cette battante aux multiples surprises.

De l’opposition de ces personnages naît une confrontation constante où les joutes verbales et les provocations sont légion. Elle entraîne aussi un slowburn délectable et frustrant à souhait qui m’a arraché son lot d’imprécations tant l’auteure sait faire monter très haut la tension pour l’atomiser en une phrase, un geste, une volte-face.

C’est terriblement réussi, incroyablement fort et ça contribue à maintenir une tension sous-jacente qui est l’un des points forts de ce roman.

Un autre de ces atouts réside dans les thèmes lourds abordés dans cette histoire. Je ne vous les dévoilerai pas, évidemment, même si j’en avais deviné une partie. Manon Donaldson les traite sans complaisance mais avec un sens de l’empathie tel que j’ai dû, à plusieurs reprises, m’interrompre, reprendre mon souffle.

Vous l’aurez compris, ma première rencontre avec la plume de Manon Donaldson ne sera certainement pas la dernière tant elle m’a offert à travers Trey une romance complète, prenante, bouillante, de ces lectures qui donnent envie de plus. Ça tombe bien, il me reste deux frères à découvrir, Drake, le personnage central d’(in)justice à retrouver ici  (In)Justice et le petit dernier Mason, (In)docile à souhait (In)docile.

 

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