Forgive me d’Alexie Fioren

by Gwen

Titre Forgive me

Auteure Alexie Fioren

Editeur Black Ink Editions

Date de sortie 2 mai 2025

Un titre à retrouver ici Forgive me d’Alexie Fioren

Un gogo danseur, une élève styliste. Vous pensiez embarquer dans une romance légère et facilement dévêtue? Erreur, prenez vos billets pour l’Australie où Alexie Fioren vous emmène, dans une romance excellente, entre un slowburn explosif, une quête de rédemption et des thèmes profonds et parfaitement traités.

Lya est une jeune femme au début de la vingtaines, coincée dans une vie étriquée entre son petit frère Enzo et son père, un modèle de patriarche exigeant, un peu réac sur les bords, et très très macho au fond. À la maison, elle est cuisinière option femme de chambre. Travailler? En attendant de devenir une femme respectable. La mode? Un milieu de débauchés.

Aussi, lorsque Lya intègre une formation pratique sous l’aile protectrice de Claire, les ennuis se profilent. D’autant que son stage ne va pas se dérouler dans n’importe quel cadre. Non non, les personnes que Lya va devoir « habiller », ce sont des danseurs d’un genre particulier, ceux qui finissent avec le moins de tissu possible sur eux.

Gogo danseurs et costumes? Evidemment, et même des costumes exigeants, alliant solidité, efficacité et glamour. En montrer beaucoup d’accord, mais tout en restant chic!

Il faut dire que le maître d’œuvre de cette troupe, Jon Bennett, est un homme plein d’exigences, avec les autres tout autant qu’avec lui-même.

Une tache sombre noircit son passé et, même des années plus tard, il ne cesse de la porter sur lui. Elle détermine ses choix de vie, à commencer par son départ de sa Nouvelle-Zélande natale, en poursuivant par son refus farouche de s’attacher à qui que ce soit qui pourrait détenir le pouvoir de le briser de nouveau.

Une gamine effrontée et pourtant fragile sous la carapace tout autant que les autres. Plus, peut-être, parce que dans le caractère de Lya, dans son tempérament, dans ses fêlures aussi, il ressent un risque potentiel bien trop grand pour son sacro-saint contrôle et toutes les murailles qu’il a dressées autour de sa vie et de son cœur.

Forgive me est un roman complexe qui se découvre par touches successives, toutes amenées avec force et délicatesse par le talent d’Alexie Fioren.

Il est un slowburn intense et oppressant, parce que le désir ne fait pas tout et que, même dans les moments les plus intenses du lâcher prise, il reste une once de conscience et que celle-ci, avouons tout, je lui aurais bien dit deux mots parfait.

C’est un livre sur la famille et le poids qu’elle représente dans nos vies. Le poids des attentes que l’on place en nous, ou que l’on suppose ainsi. Le poids de savoir poser ses marques, prendre ses distances et son envol, pour oublier, pour expier, pour déployer ses ailes et trouver une vie meilleure.

Il évoque aussi, à sa manière, la difficulté d’être parents, d’apprendre à couper le fil qui nous relie à l’être qu’on aime le plus au monde, de ceux qui taisent leur chagrin pour respecter ce besoin d’espace nécessaire à ceux qui, au contraire, se montrent maladroits car ils ne savent pas dire leur crainte de perdre le lien particulier entre générations, de renouveler les erreurs déjà commises.

Il parle aussi de différence d’âge et de tout ce qu’elle implique lorsque le désir brut n’est pas la seule variable à considérer. Différence d’âge, différence de posture dans la vie, différence d’attentes pour le futur. L’âge, ce n’est qu’un chiffre, disent certains. Jon a son propre avis sur la question!

Forgive me est, comme son nom l’indique, un livre sur le pardon. Le pardon que l’on attend, ou non, de l’autre, pour la faute commise ou pour ce qu’il a enduré en tant que dommage collatéral, mais plus important encore, le pardon que l’on s’accorde à soi-même.  Jon se bat contre la pire des culpabilités, celle des hommes bien sûr, mais aussi celle qu’il traîne en lui comme une gangrène qui dévore, impitoyable, son coeur et toutes les perspectives heureuses. C’est elle encore qui lui fait accepter l’intolérable, comme si sa vie entière n’avait plus pour fonction que de se punir. C’est un combat terrible et particulièrement émouvant dans sa violence comme dans sa profondeur.

Forgive me est enfin une réflexion sur l’engagement, sur le choix de la solitude et le risque qu’on court lorsqu’on décide de prendre le risque de s’ouvrir aux autres. Assumer qui on est avec ses pires côtés, reconnaître ses erreurs, faire un pas vers l’autre quand les choses se gâtent, trouver l’équilibre entre le respect du silence et les secrets, accorder sa confiance totale et instantanée. Dans ce roman, Alexie Fioren nous livre un condensé de toutes ces questions que chacun, même s’il n’est ni styliste apprentie ni gogodanseur, a croisé un jour ou l’autre.

Et par-delà l’histoire dépaysante dans ces terres australiennes qu’elle m’a donné envie de découvrir, par-delà son talent de narratrice, par-delà la passion intense, dévorante et hautement inflammable, par-delà la plastique parfaite de Jon qui a remisé Magic Mike au rang d’amateur, c’est sans doute la somme de toutes ces réflexions sur la vie en entier que je retiendrai.

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