Tainted Hearts tome 1 de Jenn Guerrieri

Titre Tainted hearts tome 1

Auteur Jenn Guerrieri

Éditeur Plumes du Web

Date de sortie 5 novembre 2020

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Jenn Guerrieri est l’une des rares auteures qui peut se vanter de me faire lire de la romance aux accents sombres, et d’adorer ça.

Après le glacial Evan Black d’Attirance criminelle (chroniques à retrouver sur le site), voilà qu’elle s’est mise en tête de m’entraîner dans les délires tordus d’un chanteur de rock écorché vif, qui ne vérifie que trop bien le bon vieux Sex, drugs & rocknroll avec une spécialisation dans l’art de pourrir la vie des rouquines qui croisent sa route et un talent à se damner.

Tel est Chester Hanson, le chanteur des Chainless et héros de Tainted hearts, la nouvelle série de Jenn Guerrieri pour les plumes du Web.
Et quoi de plus éloigné d’un chanteur d’un chanteur de rock, sombre et versé dans tous les excès, incapable de respecter la moindre règle, la moindre rigueur? Qui de plus apte à lui faire péter les plombs?
Une danseuse classique? Pas faux! Une danseuse classique ROUSSE? Très certainement.

Une danseuse classique rousse qui ne se pâme ni devant sa musique ni devant sa petite personne et capable de le remettre en place en une phrase? Absolument!

C’est comme ça que lui apparaît Ally Owen de prime abord. Comme une abomination!

Quelqu’un qu’il veut traquer et détruire psychologiquement. Et plus Ally relève la tête, plus il veut la lui mettre sous l’eau.

Moyen de passer le temps? On pourrait le croire. Mais il y a plus à creuser dans le cerveau et le cœur fracassés du chanteur.

Le pire? C’est un être de génie, capable de transcender les foules lors de ses concerts. Capable de remuer les âmes lorsqu’il met la sienne à nu dans son nouveau titre.

Mais le génie créatif qu’il met dans sa musique, il l’utilise tout autant pour faire de la vie d’Ally un enfer.

Un juste retour des choses, pense-t-il.

Sauf que, …

Sauf qu’il ne sait pas qu’Ally est bien plus fragile et fêlée que sa façade impassible ne le laisse penser. Jenn Guerrieri distille avec talent, par petites touches méticuleuses, les éléments qui permettent de deviner ce dont il s’agit.

Sauf que par son jeu psychologique malsain, Chester touche à l’intouchable. Julian Coles, journaliste stagiaire au New York Post. Accessoirement le meilleur ami d’Ally. Accessoirement le seul à tout savoir d’elle…. Tout sauf ce que le chantage de Chester l’oblige à cacher.

Sauf que sa volonté à la détruire rend au contraire Ally plus combattive, plus résistante. Il faut dire qu’elle a l’habitude de faire face. Remonter la pente après son traumatisme pour rester dans la célèbre école d’art Julliard, résister à Tifanny, la terreur du cours et à sa clique, accepter sans broncher les remontrances acides de ses professeurs, tout sacrifier pour atteindre peut-être un jour le Graal, une place à l’opéra de Paris. Tout ça, ça forge un tempérament. Un Chester Hanson n’est qu’une ligne de plus dans la liste de ses ennuis.

Surtout qu’elle peut compter sur la bonhommie maladroite de Matt et Yann, les deux frères terribles des Chainless, et surtout sur l’amitié ambiguë d’Alden, le guitariste, le meilleur ami de Chester.

Celui qui sait tout de lui, qui tente de lui garder la tête hors de l’eau. Le seul qui se soit cru autorisé à dire les choses qui font mal. Le garde-fou entre Chester et le reste du monde. En tous cas, il faut l’espérer.

Mais ce qui rend ce roman encore plus fort, plus oppressant, et paradoxalement plus attachant, c’est que Chester n’est pas uniformément une ordure. Par moments, il se révèle même sous un autre jour qui le rend extrêmement touchant.

Gentillesse non maîtrisée et presque accidentelle? Vrai trait de caractère enfoui sous l’amertume et le dégoût de voir sa musique devenir un tiroir caisse?

Il est difficile de le dire.

Et pourtant, entre les deux jeunes gens, les lignes bougent, tantôt vers une haine si forte que le danger devient presque physique, tantôt dans des trêves qui ressembleraient presque à de l’attention, de plus en plus dans une tension électrique qui menace de déclencher l’apocalypse.

C’est que, en dépit du projet d’origine de Chester, il ne peut s’empêcher de vibrer pour Ally, de multiples sentiments, généralement sombres et destructeurs. Mais il est aussi animé d’une attention presque jalouse qui a contribué à me faire tourner la tête et à brouiller les cartes habilement.

Dans une ambiance souvent étouffante, Jenn Guerrieri nous propose un roman qui m’a tenue dans une apnée aussi malaisante qu’impossible à fuir où les deux blessés de l’âme répètent tellement qu’ils se détestent qu’on en vient à douter. Tout comme eux en fait.

–Je te fais peur?

Je frémis dès que ses lèvres se logent à la naissance de mon cou.

–Tu me terrifies …

Alors que son nez frôle ma gorge, sa bouche tentatrice se met à embrasser ma chair. Il lape, mordille et joue avec la même parcelle pour mieux la ravager de sa fougue.

–Et toi … tu me fais mal, me révèle-t-il entre deux baisers.

(…)

–Pourquoi tu ne t’éloignes pas de moi alors?

–Parce que sans douleur, je ne suis qu’un cerveau lobotomisé. J’ai besoin d’elle en tant que pénitence, pour créer, percevoir et sentir que je suis encore en vie.

Un aveu presque arraché dans un instant de vulnérabilité réciproque. Un virage dans une romance ténébreuse peut-être. Une parenthèse de sincérité.

En tous cas une raison de plus pour attendre avec impatience de découvrir la suite du destin de Chainless.

La troupe est à Los Angeles, cité des anges ou ville de tous les démons. Rendez vous bientôt pour le savoir. Et comme souvent avec Jenn Guerrieri, il y a fort à parier que la vérité ne soit pas aussi tranchée. Pour mon plus grand plaisir.

 

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