Fire meet gasolne de Karyn Adler

Titre Fire meet gasoline

Auteur Karyn Adler

Éditeur Kyrro Editions

Date de sortie 11 octobre 2022

Un titre à retrouver ici Fire meet gasoline

 

Décidément, les titres de Sia inspirent Karyn Adler! Après le bouillant Dusk till dawn (voir le lien de chronique ici https://melimelodegwen.fr/dusk-till-dawn-de-karyn-adler/ ), c’est au son de Fire meet gasoline que s’ouvrent de nouveau les portes de l’Aphrodite.

Si on y croise régulièrement le beau Riley, non comme acteur principal des chambres privées mais comme l’amoureux de June et le poil à gratter de l’histoire, c’est autour de Zia et de Denton que se développe une histoire sulfureuse, bouillantissime, charnelle où les sentiments s’invitent à l’insu de ses protagonistes.

Mais ne mettons pas les corps avant les esprits, ni l’Aphrodite avant l’histoire!

Zia Campbell, la meilleure amie de June, travaille avec elle au sein de Brightness Editions. Les deux inséparables, quelle surprise, sont spécialisées dans la romance. Mais là où June, avant même la rencontre décisive qui a bouleversé sa vie, est une incorrigible fleur bleue qui envisageait l’amour par les sentiments plus que par le charnel, Zia est son opposé parfaitement complémentaire. Elle n’a pas froid aux yeux, ne manque ni d’audace ni d’appétit. Elle aime le sexe, sait ce qu’elle y cherche et surtout ce qu’elle n’y veut pas: ni attaches ni sentiments. Ses maîtres mots, contrôle et indépendance.

Ne cherchez pas de son côté une Barbie en recherche de son Ken. Zia est une femme forte et indépendante. D’ailleurs, elle travaille comme elle vit et développe avec June une nouvelle collection qui mêle la romance à des femmes battantes, de celles qui n’attendent pas assises dans un coin qu’un prince charmant vienne leur apprendre la vie.

Leur patron soutien leur projet, au point qu’il décide d’organiser une communication digne de ce nom.

Le cabinet Meyers en est chargé, représenté par le fils de son PDG, Denton. Denton? Ce nom parle à celles qui ont déjà poussé les portes de l’Aphrodite?

Ce n’est pas une erreur. Le loup ténébreux en est l’un des piliers avec Riley et Marlowe. Il est aussi l’un des rares qui connaisse vraiment Moira. C’est un homme froid, autoritaire, séducteur à condition de mener la danse. Le passé qu’il partage avec Riley et June ne plaide pas en sa faveur.

Sur le plan professionnel, il est le parfait adversaire pour Zia. Il dit paillettes, elle lui répond talons aiguilles, il parle rose, elle rétorque rouge passion. Il parle Barbie, elle l’assure qu’il n’a rien ni d’un Ken ni d’un Kevin.

Bref, deux adversaires qui jouent à chien et chat dans des face à face des plus jouissifs.

Et ça tombe bien, parce qu’il est un domaine ou la peste et le connard déterrent une autre hache pour une autre forme de guerre, c’est dans le plaisir. Tous deux habitués de l’Aphrodite, ils ne s’y sont jamais croisés, confrontés, contentés.

Aussi, quand l’électricité d’une sensualité déséquilibrante menace de nuire à leur projet commun, il ne reste qu’une solution.

Se perdre dans les bras l’un de l’autre, une fois, dans l’une des chambres de l’Aphrodite plutôt que de se provoquer dans tous les coins de la maison d’éditions.

Une folle étreinte pour solde de tout compte. Ou deux, ou trois, ou plus, tant que le deal est clair: satisfaire ses envies, laisser libre cours à ses instincts, même les plus sombres et repartir à la guerre de plus belle.

Pas de risque, pas de contraintes puisqu’en aucun cas il n’est question de sentiments, n’est-ce pas?

Autant le dire tout de suite, j’avais vibré pour June et Riley. Denton et Zia m’ont fait passer par toutes les couleurs de la passion. Rouge luxure et noir tristesse, jaune trahison et vert tentation, Karyn Adler a composé une romance qui va vous donner très très chaud.

Autant June était une « petite chose fragile », une convalescente des sentiments en initiation à la passion, autant Zia est d’un autre acabit.

C’est une femme moderne, qui sait ce qu’elle veut et l’assume pleinement. La collection qu’elle veut monter est à son image, à l’image de nombre d’entre nous et elle va de pair avec une évolution des histoires que j’aime lire en romance.

Il y a d’ailleurs  de très jolies références au monde de l’édition que madame Adler a toutes les raisons de bien connaître et des deux côtés du clavier en plus. Je ne peux m’empêcher d’ailleurs de sourire du clin d’œil de l’épilogue particulièrement prometteur mais chuuuuut. Et interdiction de lire la dernière page pour commencer. Il y en a tellement à dévorer d’abord!

J’ai été séduite par cette histoire pour plusieurs raisons.

En premier lieu, un immense bravo à l’auteure pour avoir tiré parti de Denton-Connard-Meyer. Quand je l’ai croisé dans le premier volet, je ne pensais pas qu’on pourrait apprécier ce personnage. À plusieurs reprises dans le roman, son côté tête à claques prend le dessus. Sauf que cette fois … on sait ou du moins on devine et on découvre au fur et à mesure les dessous de son attitude. Connard pour la galerie, cœur meurtri pour les intimes. J’ai été touchée, là où je ne l’attendais pas forcément, par la richesse du personnage, celle qui ne se compte ni en dollars ni en orgasme!

Il y a de la colère en Denton. Il l’exorcise avec des parties endiablées où il gare toujours le contrôle au contraire de sa vie hors des murs insonorisés de l’Aphrodite. Là, il subit trop souvent la loi de personnes dont il peine à se défaire. Au club, il est tout puissant du moins jusqu’à ce qu’une certaine éditrice vienne le défier et s’insinue un peu trop dans sa routine.

Denton n’est pas exclusif. Il les comble toutes de ses appétits. Du moins jusqu’à elle.

Denton est attentionné, parfois. Il est amusant pour peu qu’il s’en donne la peine. Il est même vulnérable si on y regarde de plus près, mais ne le dites pas trop fort, l’homme n’aime pas être confronté à ses failles. Ça peut même le rendre très bête.

Le passé de Denton soulève des questionnements que, bien évidemment, je ne vais pas développer ici, suspens oblige, mais qui parlent à chacun et que Karyn Adler maîtrise particulièrement bien.

Ensuite, j’ai été conquise par la relation entre les personnages. Leurs accrochages sont épiques, leurs rapprochements sulfureux, leurs silences m’ont vrillé le cœur, leur vulnérabilité non assumée une souffrance. On sourit des passes d’armes, on tremble des rendez-vous manqués. On vibre -beaucoup- de tout ce qui frétille, fourmille, accroche et dérape.

J’ai aimé aussi retrouver l’atmosphère à part de l’Aphrodite, ses habitués et son équipe, ses codes et sa vie trépidante. J’avais eu l’impression d’en apprendre davantage dans le premier volet. Ici, le décor est déjà planté, on entre comme de vieux habitués. Pourtant, les développements de l’histoire vont nous y faire passer beaucoup de temps mais de façon un peu différente.

Par ailleurs, ne nous le cachons pas, ce roman est une drogue dure au désir, au plaisir sous toutes ses formes. Là encore, Karyn Adler -mais qui pourrait en douter? ne fait pas dans la demi-mesure et les ellipses. On baise à l’Aphrodite, on jouit, on assume ses désirs et on libère ses fantasmes. L’auteure rend tout ça avec talent et brio pour un récit résolument calliente.

Mais on aurait tort, de nouveau, de ne focaliser son attention que sur les scènes de sexe, comme on aurait tort, d’ailleurs, de les occulter car elles sont particulièrement bien écrites et Dieu sait comme c’est difficile -même si glisser Dieu dans cette phrase ….

Le récit de Fire meet gasoline est bien plus complexe que l’affrontement de deux fortes têtes qui ne trouvent un terrain d’entente que dans des étreintes passionnées. Le roman parle des challenges permanents que l’on s’impose, il parle de la volonté de garder le contrôle sur tout ce que l’on peut maîtriser et sur la difficulté de lâcher prise, d’accorder suffisamment de confiance pour se remettre entre les mains d’un autre. C’est surtout un récit sur des hommes et des femmes imparfaits, qui vivent, luttent, aiment, se déchirent et apprennent à se connaître eux-mêmes avant de partir à la découverte de l’autre.

Ce roman est fort parce qu’il s’attache aux certitudes des personnages pour les faire évoluer vers une meilleure version d’eux-mêmes. C’est l’une des raisons pour lesquelles je l’ai autant aimé, une de celles aussi qui me rend aussi fan de l’écriture de miss Adler et de son talent pour dépeindre les gens dans toute leur parfaite imperfection.

Ce qui nous entraîne, pour finir, à évoquer LE coup de cœur de ce roman Zia et plus encore la prouesse de gymnaste de l’auteure. Dans le premier volet de l’Aphrodite, elle avait dépeint le côté femme fragile et pourtant résiliente de June. On avait assisté à sa métamorphose, pour le meilleur et parfois pour le pire. Chaque pas était un combat, chaque victoire était un triomphe parce que rien n’était évident dans le chemin vers elle-même qu’entreprenait celle qu’on avait toujours guidée. Dans ce deuxième volet, Karyn Adler prend presque le contrepied parfait. Zia est un personnage de romance comme on n’en croise pas beaucoup. Plus qu’une simple langue bien pendue, c’est une femme qui assume qui elle est et ce qu’elle veut: un boulot qui l’éclate, une amitié plus forte que tout, du plaisir à volonté, le tout avec un tempérament que certains qualifieraient de masculin mais qui est seulement celui d’une femme moderne, d’une femme qui mériterait bien de trouver sa place dans la nouvelle collection de Brightness, d’une femme qui a assurément toute sa place dans l’écrin aux personnalités puissantes et plus sensibles qu’il n’y paraît qu’est la maison Kyrro Editions.

Pour autant, on se tromperait en ne voyant en Zia qu’une virago. Mais là où June devait apprivoiser son corps et ses désirs, Zia doit, pour sa part, accepter sa part plus sensible et même sentimentale. Comme les deux côtés d’un miroir, les deux amies forment le parfait dyptique et le plus bel équilibre. Romantique le jour, sensuelle la nuit? Sensuelle au quotidien, sensible par instants? Pourquoi choisir ?

Entre volupté et sentiment, entre June et Zia, Karyn Adler nous donne une nouvelle fois une très belle leçon de vie: la romance, l’amour et la vie ne suivent pas un seul chemin, ne répondent pas à un seul code. Ils sont ce qui nous rend heureux avec nos imperfections et nos doutes, avec le regard des autres et leurs incompréhensions. Ils sont nous, tout simplement et pourtant avec tant de facettes et de complexité.

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