Faded Rose 1 de Jenn Guerrieri

Titre Faded Rose

Auteur Jenn Guerrieri

Éditeur Plumes du Web

Date de sortie 8 Novembre 2022

Un titre à commander ici Faded Rose

 

Deux ans après avoir fait la connaissance des Chainless dans l’hypnotique trilogie Tainted Hearts ( voir ici https://melimelodegwen.fr/tainted-hearts-tome-1-de-jenn-guerrieri/ ), Jenn Guerrieri récidive pour une arme d’amour et de frustration massive, un roman intense d’amour et de culpabilité, de passion et de peurs, un roman sur fond particulièrement lourd qui va agiter vos neurones et malmener vos sentiments.

Replaçons l’histoire. Vous vous souvenez des Chainless? ce groupe de rock qui interprète à la perfection la partition Sex, drugs & rock’n’roll? Mais si, les frères Miller, déjantés, parfois un peu lourds, animés d’une improbable passion pour Despacito mais potes au cœur d’or. Et puis Chester… Je ne vous fais pas l’affront de vous présenter de nouveau cet ange ténébreux auto-destructeur et bourreau des âmes, au talent aussi immense que le sale caractère. Il a eu trois tomes rien que pour lui et si on le croise régulièrement dans Faded Rose, il n’est que le choriste du duo intense dont Alden Hayes est la vedette.

Alden, guitariste de grand talent, plus attaché à sa Gibson qu’à tout être vivant. Alden et ses mèches d’un blond tirant sur le blanc. Alden, le contrepoint de Chester dont il tempère souvent les travers. Alden, le protecteur, le confident. Alden, capable de jouer un jeu de dupes à Ally, pour la bonne cause mais quand même.

Alden qui, pour bien des raisons, a décidé de prendre sous son aile Carla Walker, la fille de son producteur, une ado bourrée de talent mais aux nombreuses difficultés. Elle est comme sa petite sœur, sa princesse, celle qui peut tout lui confier, celle qui lui a promis que plus jamais elle ne tairait les problèmes majeurs qui ont pourri sa vie d’adolescente.

Il faut dire que pour Carla, le qualificatif « pauvre petite fille riche » semble une description des plus justes.

Fille de parents divorcés aussi différents qu’on peut l’être, elle est la synthèse de deux systèmes de valeurs opposés.

Son père est l’un des producteurs les plus en vue du moment. Il est en permanence pris dans un nouveau projet, une nouvelle découverte, la gestion d’un nouveau talent. Il a réussi, en est fier et le montre. Le roi du bling bling. Mais c’est aussi un producteur attentif qui a fort à faire avec ses quatre mauvais garçons préférés, même si la relation de Chester et Ally calme -un peu- le plus ingérable des Chainless, à condition bien sûr que l’un des trois autres ne prenne pas le relais.

Pour autant, c’est un père investi auprès de sa fille, qui se pardonne mal de ne pas avoir vu le mal qui la rongeait au lycée.

De l’autre côté, la mère de Carla n’a jamais aimé le strass et les paillettes. Fleuriste de talent, mariée à un océanographe, elle a davantage les pieds sur terre et l’esprit du côté des sentiments.

De ces deux parents attentifs, Carla a pris le meilleur. Elle bénéficie de moyens suffisants pour mener sans problème ses études de musicologie. Elle baigne dans une culture musicale assez solide pour être sensible à tout. D’ailleurs, l’art sous toutes ses formes est une partie importante de sa vie. C’est un personnage très attentif aux sentiments des uns et des autres, pétrie d’une sensibilité qui la fragilise souvent même si elle a appris à dresser des barricades autour de son cœur fragile.

Peu nombreux sont ceux qui peuvent franchir les herses de son donjon. Il y a ses comparses du club des ratés, Hector, ses cheveux bleus et sa spécialité, le ratage des examens, Judith, la fan absolue de Paris Hilton, ratée du sport, Aaron, le rapeur raté du tact et de la diplomatie et Elijah, l’invisible de la bande, le muet de l’Utah, incapable de nouer de vraies relations sociales autres que celles de leurs réseaux de discussion. La quintette imparfaite est pourtant un rempart solide contre la plupart des mots même si, là aussi, Carla, qui veille à protéger tout son monde, garde souvent le silence là où elle aurait pu attendre de l’aide.

Mais l’élément le plus instable de la vie de la jeune femme, c’est Alden. Elle le connaît depuis l’adolescence, lui a offert le cadeau et les mots les plus importants dans l’un des jours les plus sombres de sa vie. Il a été son confident, le protecteur de son adolescence. Seulement Carla n’est plus une adolescente mais une jeune adulte dont les sentiments ont évolué.

Exit le grand frère attentif, elle voit en Alden un homme, l’homme dont elle est irrémédiablement tombée amoureuse.

Comment continuer à avancer quand les chemins prennent des directions opposées? Comment ne pas gâcher ce qui existe entre eux? Comment construire sa vie amoureuse quand on n’a dans le cœur que l’homme que toutes les midinettes veulent séduire. Or Alden est généreux de sa personne à défaut d’engager son cœur. Celui-ci est resté bloqué quelque part, il y a des années et rien ne semble apte à le réparer.

Et si lui aussi a bien remarqué que Carla n’a plus rien de la jeune fille qu’il a voulu protéger comme un rachat du passé, que faire de ce qu’elle lui inspire?

J’ai beaucoup aimé ce roman.

En premier lieu, j’ai adoré retrouver les Chainless comme on retrouve une vieille bande de potes qu’on a pas vus depuis longtemps avec le sentiment de les connaître et la joie de les redécouvrir. Sentiment très agréable aussi d’avoir des nouvelles des amours des uns et des autres mais chut, je ne dis rien. Si on retrouve facilement les traits de caractère de chacun, j’ai eu un coup de cœur pour l’évolution de Chester. Toujours aussi sale gosse, toujours provocateur et parfois flippant, j’ai aimé sa relation avec Alden. On les savait soudés. J’avais apprécié les moments où Alden le provoquait, le secouait, le poussait dans ses retranchements. J’ai aimé que la pareille lui soit rendue et plus encore la façon bourrue mais tellement sincère avec laquelle le frontman des Chainless épaule son frère de cœur.

Ensuite, je suis toujours aussi sensible à la plume de Jenn Guerrieri. J’aime sa façon d’aborder l’art et la relation de chacun avec son domaine de prédilection. La danse, la musique, il y a une poésie certaine dans la manière dont elle nous rend spectateur des processus de création, des performances et son talent remplace presque les sens concernés. Je suis tout aussi fan de sa façon de rendre les sentiments, même les plus moches, sans fard mais avec la lumière blanche de la vérité crue. Dans ce registre, les chapitres passés dans la tête d’Alden sont des purs moments d’émotions intenses qui montrent derrière l’image maîtrisée, derrière les cris d’amour des fans, il y a un homme qui ne s’aime pas et se refuse tout droit au bonheur. Ce volume permet aussi d’effleurer des zones très sombres que je ne soupçonnais pas vraiment. Dans la trilogie d’origine, j’avais affublé le guitariste de quelques noms d’oiseau pour son comportement avec une certaine danseuse. Je ne pensais pas en venir à le maudire si fort.

Et pourtant. La version d’Alden qu’on découvre ici est particulièrement troublante. Ne le cherchez pas tout blanc ou tout noir mais préparez-vous à le détester autant que vous l’aimerez, à le plaindre quand vous ne le maudirez pas.

L’éclairage apporté en cours de lecture donne évidemment des clefs pour le comprendre et le fait d’être troublé si fort par l’intouchable par excellence n’en est pas la moindre. Pourtant, j’ai été touchée par les moments où il se montre attentionné et attentif mais j’ai eu envie de mettre quelques touches de colorant rose bonbon dans sa teinture au moment où il tentait de remonter toutes les barrières autour de lui sans égard pour les dommages collatéraux.

Mes sentiments pour Carla sont plus clairs. Je suis à la limite de chercher à contacter babouche0415 son blaze sur la toile et lui proposer de me faire une place dans son club des ratés. J’adore cette nana. Outre son parti pris vestimentaire et capillaire, je suis surtout fan de sa résilience face à ce qui a fait son passé, sa façon de redresser le menton et de dresser un doigt bien haut envers ceux qui prétendraient encore s’en prendre à elle. J’ai été touchée par les moments où elle semble perdue dans sa vie et ses aspirations parce que Jenn en fait un portrait qui parlera à tout parent d’ado -je suis un peu trop loin de la case « ado » moi-même pour en juger.

Et bien sûr, j’ai été conquise par sa façon de faire face à ce premier amour, évident et impossible, celui qui marque au fer rouge dans le meilleur comme le pire.

Enfin, j’ai aimé ce roman pour l’histoire qu’il raconte. Il y a cette romance atypique, difficile à classer. Il nous offre des moments intenses et des chutes vertigineuses. J’ai hâte de découvrir de quelle façon l’auteure va mener la suite de ces montagnes russes qui paraissent salement embarquées.

Mais il y a aussi le fond, celui qui parle de rédemption, d’arriver à accepter ses fautes et les erreurs du passé, de vivre malgré elle et par-dessus elles. C’est un aspect très fort du roman et là encore, il y a un beau travail mené par l’auteure qui permet de s’immerger profondément dans ce mal-être.

Et je ne peux finir cette chronique sans parler de l’autre thème fort du roman, celui qui a déjà été esquissé dans Tainted hearts. Faded Rose traite d’un fléau particulièrement redoutable et ravageur. Il a frappé ou frappe encore, une partie des protagonistes de l’histoire. Je ne veux pas en dire trop pour ne pas spoiler ceux qui n’auraient pas encore lu Faded Rose. Là encore, le mal-être des personnages, l’impact à long terme et toute la réflexion qui guide l’écriture de Jenn Guerrieri font de ce roman, outre tout ce que j’en pense de meilleur, un texte utile à tous.

Pour toutes ces raisons, ne passez pas à côté d’Alden. Pour toutes les questions laissées en suspens, Jenn, steplait steplait steplait, la suite !!

 

 

 

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