Thorns and Roses de Max Nena

Titre Thorns and Roses

Auteur Max Nena

Éditeur Kyrro Éditions

Date de sortie 31 mars 2023

Un titre à retrouver ici Thorns and Roses

J’aime celui qui rêve l’impossible.

Cette phrase, comme celle qu’on peut promettre à son premier amour, est une ponctuation magnifique et significative du premier roman que Max Nena nous propose chez Kyrro Editions.

J’ai déjà eu l’occasion de dire et d’écrire tout le bien de la maison menée du cœur et de la passion de Loïs Smes et Karyn Adler. Leur nouvelle protégée entre de plain-pied dans tout ce qui fait la valeur et le succès de la maison: une histoire prenante, qui sort des sentiers battus, qui aborde avec force et courage des thèmes marquants, une écriture particulièrement bien maîtrisée, notamment pour un premier roman, des personnages qu’on aime et qu’on déteste par moments avant de réaliser qu’on ne peut pas les rêver autrement qu’avec leurs failles et leurs forces.

Vous l’aurez compris, ce Thorns and Roses m’a totalement séduite et, si j’en crois les échos qui me parviennent, je ne suis pas un cas isolé.

Juliette est une jeune trentenaire, infirmière libérale, mère débordée avec ses deux princesses, Lou et Ninon, des enfants pleines de vie, à la sensibilité exacerbée pour l’une, aux qualités particulières pour l’autre. Elles sont la prunelle de ses yeux, sa raison de se lever tous les matins et de lutter contre les ténèbres qui cherchent à l’aspirer depuis un an.

Un an? Le temps qui s’est écoulé depuis la mort brutale de Marco, le père des filles. L’homme de sa vie? Pas exactement.

Marco, c’est l’amour rassurant, celui qui a su réparer son cœur, combler la brèche laissée par la rupture vécue, quinze ans plus tôt avec Malik, son premier amour.

Que dit-on du premier amour? Qu’il a une place à part dans son cœur et sa construction d’adulte. On dit aussi qu’à dix-sept ans, on n’est pas sérieux. On dit tellement de choses et leur contraire. Pourtant, pour Juliette et Malik, ce premier amour a eu le goût de l’absolu et l’amertume de l’impossible.

Issus de milieux différents, élevés au sein de familles peu compatibles, ils se sont aimés, envers et contre tout, ont formé les projets fous et passionnés qu’on rêve quand on aime pour la première fois. Mais tout ceci a explosé, disloqué, volé en éclat sur une simple discussion.

Simple?

Dévastatrice, destructrice, conditionneuse de vie, exterminatrice de toute relation future, mais certainement pas simple.

Quinze ans plus tard, tous deux en sont encore marqués. C’est vrai pour Malik qui a construit une brillante carrière aux Etats-Unis pour ne plus jamais se sentir autre chose qu’à la hauteur, mais néglige de construire une vie personnelle. L’amour? C’est un mot tabou, compensé tant bien que mal par quelques plans cul sans conséquences.  Sa famille? Il a, de loin en loin des nouvelles avec ses sœurs, presque aucune de son frère -et il ne s’en porte pas plus mal. Le manque le plus cruel, c’est celui de ses parents, Maryam et Ayoub, à plus forte raison depuis que l’état de santé de son père s’est dégradé.

Pour Juliette, qui est restée à la Syne-sur-Mer, la terre de leur jeunesse, Malik n’est que le fantôme d’un passé qui n’a jamais totalement disparu et ajoute à sa culpabilité de survivante. Elle a donné son affection à Marco, son corps, ces deux fillettes qui ont scellé leur union mais elle le sait, son cœur n’a jamais pu lui appartenir, du moins pas aussi complètement qu’il l’aurait fallu.

Cette certitude n’atténue pas sa peine, bien au contraire. Désormais privée de celui qui avait su suturer ses plaies à vif et mettre du baume sur ses blessures les plus profondes, Juliette s’interdit de revivre, comme si cette punition éternelle était la juste sentence pour ne pas s’être donnée pleinement, de toute son âme.

Les efforts de Marie et Elodie, ses meilleures amies, la bienveillance à distance de son frère Maxime, rien ne lui évite de sombrer, à part peut-être la bienveillance de certains de ses patients, comme Ayoub, fraîchement remis d’un AVC.

Ayoub? Vous avez dit Ayoub?

Oui oui, l’auteure est joueuse, à moins qu’il ne s’agisse du destin.

L’un et l’autre vont remettre face à face les anciens amoureux, les confronter, leur offrir une chance de mettre à plat leur histoire, pour mieux l’enterrer ou la ressusciter.

J’ai été happée par cette histoire qui m’a tenue éveillée bien au-delà de toute heure raisonnable.

J’en ai aimé les personnages. Ils ne sont pas parfaits, portent des stigmates et des défauts qui ne les rendent que plus attachants.

Malik est intransigeant, sur la défensive. Il est toujours prêt à imaginer le pire et a du mal à composer avec le passé que Juliette a vécu comme une survie là où ses choix ont été différents. Dans le même temps, c’est un fils touchant, un amoureux qui se révèle incroyablement tendre, patient et attentionné. C’est aussi un homme, un frère, un businessman pris entre plusieurs feux parfois incompatibles.

Juliette est pétrie de doutes. A-t-elle le droit de revivre? Peut-elle imposer un nouvel homme à ses filles? Mérite-t-elle encore Malik avec tous les secrets qui se dressent entre eux?

Je l’aurais parfois aimée plus « carpe diem » mais les choix de l’auteure sont parfaitement cohérents et si elle en avait fait d’autres, l’histoire en aurait été moins belle.

De manière générale, le casting est une réussite, juste dans les failles et les travers de chacun.

Les amis de l’un et de l’autre ont le dosage parfait entre l’affection la plus sincère et la capacité au coup de pied au derrière salvateur. J’aurais aimé en savoir davantage sur eux -si cette phrase ressemble à un appel de lectrice, n’y voyez aucun hasard- et je ne parle même pas de Max, parfait dans le rôle du frère confident, modérateur et protecteur. Je ne dis pas ça juste parce qu’il me rappelle le mien, mais j’adore ce personnage.

Et puis j’ai eu une tendresse particulière pour la mère de Juliette, même si son rôle n’est pas toujours en sa faveur et pour les parents de Malik.

Il m’est difficile de vous en donner les raisons sans aller trop loin dans les révélations de l’intrigue mais j’ai été admirative du soin que Max Néna en a pris, en particulier dans la dernière partie de l’histoire.

L’histoire, justement, parlons-en. La romance, vous l’aurez compris, en occupe une large part. Elle n’en est pas la seule composante. Le deuil, le syndrome du survivant, la reconstruction en sont d’autres thèmes traités avec justesse et délicatesse dans des pages pudiques et intenses qui m’ont secouée.

Mais ce n’est pas tout. J’ai aimé aussi la réflexion entamée par Malik -et son mentor- sur la réussite. Parti de peu, le jeune homme s’est élevé de la force de son intelligence, de sa détermination, d’une forme de « marche ou crève » qui lui a longtemps servi de leitmotiv. On peut dire qu’il a réussi dans la vie. A-t-il pour autant réussi sa vie?

Cet aspect du personnage lui donne une profondeur parfaitement dosée.

Finalement, il y a … le reste. Le reste, c’est tout ce que je m’interdis de vous raconter pour ne rien divulguer et qui, pourtant, fait l’une des indéniables originalités du livre. Le reste, c’est ce qui m’a fait cogiter, trembler, croire que j’avais tout compris alors que …

Le reste, c’est ce tournant de l’histoire qu’on imaginait sans l’attendre vraiment et qui vous arrive en pleine figure pour donner encore une secousse à votre cœur déjà bien remué.

Le reste, c’est la dernière raison pour laquelle ce livre est incontestablement un coup de cœur, un premier roman parfaitement réussi et qui n’appelle qu’un mot. Encore!

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