Titre La muse tatouée
Auteur Kent Harrington
Éditeur Thomas & Mercer
Date de sortie 9 Avril 2019
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Un titre découvert grâce à Netgalley et à l’éditeur que je remercie.
C’est le deuxième titre de Kent Harrington que je découvre après le très prenant De Sang chaud déjà chroniqué ici.
Ce polar nous entraîne dans une aventure à rebondissements, qui suit un personnage principal pour en changer à mi-course.
Le cadre? San Francisco, et notamment la très célèbre tour Coit, point de vue célèbre pour tous les touristes de la ville et lieu central de l’intrigue. Mais aussi un appartement de très grand luxe, donnant … sur la tour Coit.
Les personnages? un ensemble d’individus qui, à première vue, n’ont qu’un point commun: leur ambition de devenir des écrivains. Ils se retrouvent régulièrement dans un groupe d’écriture. Ils sont avocats, danseuse, étudiant en médecine, rentière, détective privé.
Une seule règle entre eux: à chaque rencontre, chacun doit avoir écrit. C’est une discipline qui motive chacun, mais ça peut aussi devenir une source de stress. Les différents jeunes gens se croisent et se recroisent, nouent des idylles à la durée de vie aléatoire, mais forment une sorte de famille. Mais une famille légèrement dysfonctionnelle, car confronter des artistes les uns aux autres peut facilement virer à la rivalité ou à la jalousie.
Et voici que Martin Anderson décroche LE sésame: un roman publié, recommandé par la reine Oprah en personne, une tournée à travers les USA, une adaptation cinéma, … mais aussi le revers de la médaille et dans le cas de Martin, il est particulièrement cruel et déstabilisant.
Autour de cette trame, l’auteur tisse un maillage serré d’intrigues secondaires qui font intervenir une psychiatre ravissante et mystérieuse, une femme blonde en robe à pois, deux anciens rescapés de Dachau, un chien bruyant, un inspecteur de police.
Toutes ces histoires se mêlent et s’emmêlent pour donner naissance à un roman étouffant et déstabilisant où la limite entre folie et machination est si fine qu’on tangue en permanence, à l’ombre ou au sommet de la tour Coit bien évidemment.
Ce roman nous plonge dans une certaine Amérique entre personnages de l’imaginaire collectif, comme l’avocat, le détective vaguement désabusé ou le tribunal façon série télé, le il joue de ces codes et des attentes, offre de San Francisco la visite que tout touriste attend, … et puis soudain, il bifurque vers une autre thématique, une autre façon de voir les choses et le lecteur tourne et retourne. De la même manière, j’ai trouvé que le changement de héros en cours d’histoire, rendu possible par une écriture à la troisième personne bien riche, est un élément supplémentaire à la déstabilisation. Avec une distance sans concession, l’auteur scrute et décortique ses héros qui se retrouvent plus à nu que s’ils étaient le narrateur de leur propre histoire, avec leurs failles et leurs travers. C’est un parti pris que j’apprécie grandement.
Plus encore que dans mon autre rencontre avec la plume de Kent Harrington, j’ai aimé ici sa capacité à maintenir un suspens réussi. Grâce à des indices habilement distillés, on rembobine peu à peu la pelote de mensonges et de tromperies, mais sans jamais être tout à fait sûre de soi. Et c’est certainement ce qui tient en haleine jusqu’à la dernière page d’un polar que je recommande chaleureusement.