Ruine 1. Chasse à l’homme d’Angel Arekin

Titre Ruine

Tome 1 Chasse à l’homme

Auteur Angel Arekin

Éditeur Editions Plume blanche

Date de sortie 7 juin 2022

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Une quête où la mystique et la vengeance se mêlent, l’opposition de deux mondes, de deux systèmes de valeurs, de deux univers, une chasse à l’homme qui offre à l’écriture puissante d’Angel Arekin toute latitude pour dérouler ses qualités, voici quelques uns des ingrédients qui font de Chasse à l’homme, le premier volet de Ruine, un excellent moment de lecture.

Cerise sur le gâteau, il s’agit aussi mon premier titre original en Audiolivre. La voix du narrateur, François Tavarres, est prenante. C’est un superbe écrin qui permet de mesurer toute la force et la musicalité des mots choisis pour narrer les aventures d’Ael, d’Aodren, de Dun Aengus et des autres.

Après cette parenthèse auditive, concentrons-nous sur l’histoire, dense et riche, qui s’étire au long des chapitres.

Pour les amateurs du Porteur de mort -qui attend toujours dans ma PAL- c’est dans cet univers que se déroulent les événements, quelques siècles avant la naissance de Seïs et Naïs. Les deux histoires peuvent donc se lire indépendamment.

Les royaumes de Cairne et d’Erenn servent de décor à cette chasse à l’homme aux multiples enjeux.

Le redoutable royaume de Cairne, terre de désert et refuge pour bannis, est dirigé par la venimeuse Morguenne, une reine envoûtante, séductrice et dangereuse. Sa cour est peuplée de serfs belliqueux, d’esclaves de tous horizons et le théâtre de nombreuses intrigues. Parmi ses sujets se trouve l’ambitieux Ewen, prêt à tout pour gravir les échelons du pouvoir, quitte à frayer avec Maelenn la devineresse ou à ignorer son inclination pour Eanore, la gouvernante de la maison du haut-serf.

Ce dernier est parti depuis de longs mois, obsédé par une quête: débusquer et ramener à Cairne le garçon capable de brandir Ruine, la mythique épée. Ne dit-on pas que seule la réincarnation de Sith Suana el Erenn en a le pouvoir?

Mais le haut-serf n’est pas homme à faire dans le détail ni la compassion. Sa quête laisse dans son sillage de nombreux morts dont s’alarme Morgan Du’Hana, roi de la verdoyante Erenn.

Là, les valeurs sont tout autres. On fait la guerre pour défendre des valeurs plus humaines. Les ambitions ne sont pas absentes du conseil, loin s’en faut. Mais pour l’heure, le roi, quoique vieillissant, maintient sous sa coupe les grands seigneurs avec l’aide de son premier chevalier Aodren.

C’est à celui-ci qu’il confie la plus périlleuse des missions: retrouver le haut-serf et surtout l’enfant disparu dont on n’a retrouvé ni le corps ni la trace.

Pour Aodren et sa troupe, composée notamment de deux personnages particulièrement attachants, son homme de confiance Laegaire et Pwill, femme bannerêt à la détermination aussi grande que la valeur, il y a plus en jeu que la traque du plus haut guerrier de Cairne par son homologue d’Erenn. Il y a plus que la croyance mystique en un garçon capable de brandir Ruine.

Il y a aussi et surtout une haine inaltérable qui lie les deux hommes et rend inévitable une lutte à mort.

C’est dans ce décor qu’Angel Arekin fait évoluer son aventure. D’Erenn à Cairne en passant pas les contrées boisées des régions côtières, aucun lieu ne paraît pleinement sûr ni accueillant.

Chaque chapitre nous emmène mettre en place une pièce d’un puzzle des plus passionnants. Dans les yeux de l’enfant, de l’esclave, du serf, du chevalier, de la servante et j’en passe, ce récit permet de passer d’un lieu à un autre, d’une intrigue à une autre, d’un péril à son prochain.

J’ai totalement plongé dans ce livre, au point de souhaiter certains jours que le trajet jusqu’au travail soit plus long pour en écouter un peu plus !

J’ai d’abord retrouvé avec un immense plaisir l’écriture d’Angel Arekin. Je suis particulièrement sensible au vocabulaire riche et à la sonorité des mots qu’elle emploie. Même pour décrire une mise à mort, les sons et les mots s’accordent à l’atmosphère de l’instant et exercent un attrait hypnotique.

Ensuite, je suis totalement entrée dans l’univers proposé. J’aurais bien aimé passer un peu plus de temps à Erenn pour en découvrir les arcanes. J’ai dans l’idée que tout n’est pas aussi lisse qu’il paraît et que certains membres du conseil de Morgan Du’Hana risquent de donner du fil à retordre dans la suite de l’histoire -à moins que je ne me trompe totalement et que je sois, comme d’autres et des bien plus aguerris, tombée dans un piège. J’ai été prise dans l’attraction oppressante de Cairne. Dans les yeux d’Ewen ou Eanore, j’ai découvert les hauts lieux et les recoins sombres de la cité.

Là, le danger rôde explicitement à tout bout de champ ainsi qu’un condensé des sept péchés capitaux. Ce n’est pas très étonnant pour une cité de proscrits. Mais l’atmosphère dangereuse et la vigilance extrême qu’elle engendre ont été parfaitement rendus.

De manière générale, les nombreux personnages de ce roman méritent qu’on s’y arrête. Je n’en garderai que quelques-uns, qui m’ont particulièrement intriguée ou touchée.

J’ai beaucoup aimé Eanore dont j’ai hâte de découvrir le destin (ça, c’est pour mon côté midinette). La fragilité de sa position enviée, du danger dans laquelle la mettent ses sentiments donne envie de la protéger, surtout lorsqu’on apprend les conditions de sa vie d’avant. Pour autant, elle a déjà montré sa force et sa détermination et je suis certaine qu’elle aura encore un rôle à jouer.

Le personnage d’Ewen m’a beaucoup intriguée. J’ai hâte de savoir jusqu’où son ambition va l’emmener. J’ai essayé de comprendre ses motivations. Je crois y être arrivée par moments, mais à d’autres, ses choix, bien que compréhensibles, m’ont mise en colère. J’attends avec impatience de savoir de quel côté il va pencher. Je fonde beaucoup d’espoirs sur son évolution.

De la même manière, le personnage de Maelenn, la devineresse, est une énigme que j’ai, pour l’heure, beaucoup de mal à résoudre. Je la garde avec plaisir dans un coin de mon esprit en attendant d’en savoir plus.

Ael, pour sa part, est un autre élément d’attachement à l’histoire. Garçon rêveur, il apprend à ses dépens qu’il ne faut pas chercher à s’approcher trop près de ses rêves les plus fous. La psychologie de son personnage m’a beaucoup touchée. Il traverse des doutes et des terreurs des plus légitimes mais est aussi soulevé par de grands élans, souvent désordonnés ou trop peu planifiés, qui peuvent en faire un héros en devenir. J’ai aussi aimé sa pugnacité, le panache avec lequel il tente de préserver des parcelles de sa fierté et une certaine idée du contrôle de son destin.

Le haut-serf, pour sa part, est un personnage que j’ai aimé détester. Cynique, peu avare du sang des autres, déterminé, violent, il a, parfois, des touches de quelque chose qui tendrait presque vers un peu d’humanité, ce qui en fait un personnage plus nuancé que la brute épaisse que j’avais d’abord envisagée -même s’il l’est très souvent. Dans les yeux de ses servantes aussi j’ai trouvé des éclairages qui, là encore, estompent, relativisent et illustrent le talent de l’auteure pour des personnages très bien travaillés.

Face à cet odieux personnage, Aodren occupe une place en contrepoint. Il est du côté des « gentils », en respecte les codes et les valeurs. Pourtant, lorsqu’il se retrouve dans des situations qui, avouons-le, feraient perdre le sang froid de tout un chacun, il dévoile d’autres facettes, moins lisses, qui risquent de s’éveiller en réponse à ce qui, dans ce premier volume, pourrait presque s’apparenter à une forme de vulnérabilité.

Enfin, par-delà les personnages, j’ai aimé me laisser immerger dans cette quête héroïque digne des meilleurs jeux de rôle de mes jeunes années. Une chevauchée héroïque pour défendre l’orphelin et protéger le monde des périls que les fous sanguinaires et ambitieux font peser sur lui, des combats épiques, une quête où croyance, magie et superstitions se mélangent, c’est déjà la promesse d’un très bon moment.

En y ajoutant un soupçon de machination, une larme de luttes de pouvoirs et beaucoup d’affrontements, frontaux ou larvés, on tient un très bon roman fantasy, intelligent et bien mené.

Et si en plus, c’est signé de la plume enchanteresse et percutante d’Angel Arekin alors n’en doutez pas, c’est un très beau prélude à la quête de Ruine que je suivrai avec le même enthousiasme, à n’en pas douter!

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