Red Stories-1-Dark shadow de G.H. David

Titre Red Stories 1/2 Dark shadow

Auteur G.H.David

Éditeur Plumes du Web

Date de sortie 25 janvier 2022

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Chronique remise à jour

« Le chaos qui suit une guerre est parfois plus terrible que le conflit lui-même. »

 

Il est rare que je commence une chronique par une citation. Mais le livre dont je vous parle aujourd’hui m’a tellement chamboulée que mes habitudes ont subi le même sort.

J’ai découvert Dark shadow il y a plus de deux ans, sous d’autres cieux et je l’avais alors dévoré.

Il ressort aux Editions Plumes du Web, l’occasion de vous rappeler toutes les raisons pour lesquelles je l’ai aimé.

Au moment de sa sortie, je l’ai classé dans ma wishlist, mais le temps passe plus vite que ma PAL ne diminue et malgré les recommandations, je suis passée à côté. Jusqu’à ce que … Jusqu’à ce qu’au détour d’un concours, Geny H.David m’envoie ce livre et que je plonge dans l’univers tourmenté de Sean et Jenny, de l’Ulster des années 90 et de celle d’aujourd’hui.

Jusqu’à ce que je sois plongée dans un tel maelstrom émotionnel que j’ai dû, à plusieurs reprises, poser mon livre pour reprendre mon souffle, et que, quelques minutes plus tard, je suis repartie de plus belle dans ma lecture, incapable de m’éloigner trop longtemps de Belfast et de ses peace lines, de ce roman qui n’est pas sans rappeler Roméo et Juliette, avec une richesse de cœur et d’histoire que je n’ai pas encore totalement digérée.

Habituellement, je rédige mes chroniques « à chaud », encore imprégnée de ma lecture. Cette fois, il m’a fallu quelques heures pour assimiler, m’approprier, trier et ordonner les émotions qui m’ont assaillie en vagues puissantes.

Ce roman avait toutes les raisons de me plaire.

J’admire son autrice pour sa plume et sa personnalité, pour les liens externes à la lecture que nous avons créés. Il y a toujours, dans ce cas, une pointe d’appréhension à se confronter au travail qu’elle a mis à jour.

Je suis, pour plein de raisons plus ou moins explicables, très attachée à l’Irlande, en particulier aux « troubles » nord-irlandais. J’ai même, dans mes classeurs d’écriture, un embryon d’histoire qui a le conflit pour cadre, même s’il manquait à ce texte, outre les qualités d’écriture de Geny, le solide travail de recherche et de précision historique auquel elle s’est livrée. Pas d’inquiétude néanmoins, ce n’est pas un livre d’Histoire. Mais c’est un livre qui s’imbrique dans un passé très proche de l’Ulster et tout autant dans le présent.

En effet, si je suis fan de romances historiques, je ne suis pas sûre de pouvoir classer ce roman dans cette catégorie. D’abord parce qu’on est au-delà d’une « romance ». On est dans une histoire d’amour brute, absolue, qui dépasse les interdits, les préjugés et tous les éléments contraires.

À plusieurs reprises, la référence est posée à Roméo et Juliette. C’est un peu de ça. Mais des Roméo et Juliette qui prennent leur destinée à bras le corps et interdisent qu’on leur dicte leur loi.

Enfin, parce que le décor de ce roman est, encore aujourd’hui, un sujet sensible et trop souvent oublié. Il s’ancre dans les heures sombres de l’histoire contemporaine de l’Europe. Le conflit nord-irlandais, officiellement, s’est achevé en 1998. Il y a vint ans à peine. Mais comment le classer au rayon du passé lorsque les ennemis d’hier vivent encore ensemble, parfois sans le savoir? Quand la haine a été si loin, qu’elle a dessiné, à Belfast, un mur de la honte qui marque, aujourd’hui encore, une ségrégation spatiale, sociale et politique? Quand le conflit a divisé un peuple, une communauté, des familles et créé au contraire des solidarités indéfectibles ? Quand le sort de certains reste encore inconnu aujourd’hui, alors que les archives s’ouvrent et que les questions ressurgissent?

« La guerre, c’est quand la mort oublie les frontières du cœur et du sang »

C’est fort de toutes ces questions que le roman mène son intrigue.

Sean Griffin mène une existence en apparence paisible dans une petite ville côtière. Il y enseigne le gaëlique, doit se marier. Une vie bien rangée et sans histoire qui cache une réalité autrement plus sombre. Il y a 20 ans, Sean était le capitaine d’une milice protestante parmi les plus dures.

Il y a laissé son amour de jeunesse, Jenny Flannighan, la petite aux cheveux de feu et au caractère à l’avenant, activiste catholique impliquée par le sort et l’hérédité dans une violence qui l’a consumée. Il y a perdu aussi sa soeur Dory, disparue mystérieusement.

Tout ce passé est enterré et nul n’est censé découvrir qui il a été.

Jusqu’au jour où Jenny réapparaît. Abîmée par la vie, elle n’a renoncé à rien. Ni à son amour dévorant pour Sean qui embrase les amants maudits dès que leurs regards se croisent, ni à retrouver Dory, cette sœur de cœur qui lui est tombée dessus de l’autre côté du mur.

Cette histoire d’amour est autant celle de la passion entre Sean et Jenny que le récit d’un amour familial, absolu et déchirant entre les deux amants et leurs proches. Elle rappelle que la guerre civile a déchiré un peuple, mais a aussi eu un impact hideux dans les familles les plus unies, en fonction des circonstances et des choix de chacun.

Malgré le temps, Jenny n’a pas renoncé à retrouver Dory, et cette quête la met en danger. Preuve s’il en était besoin, que les feux de la haine ne sont pas éteints, mais que des braises rougeoyantes ne demandent qu’à s’enflammer encore.

Alors, presque automatiquement, Sean et Jenny foncent tête baissée dans tout ce qu’ils ont fui, avec une facilité déconcertante. Les réseaux et les habitudes reprennent leur droit, non pour ou contre l’indépendance, mais pour une idée de justice et pour la cause qui vaut la peine de tout sacrifier, l’amour.

Dans ce cadre, l’auteure développe une histoire où chaque mot tombe juste, où les déclarations enflammées sont d’autant plus belles que tout repose sur un équilibre précaire, où il faut vivre vite et intensément, car la mort peut frapper à tout instant -et ce n’est pas une métaphore.

Mais c’est aussi une histoire intense parce qu’elle parle de haines tenaces et de possible rédemption. Parce que parfois, une main se tend par-dessus le passé, pour en chasser les fantômes hideux.

C’est enfin une histoire bouleversante pour la solidité des sentiments qui unissent les protagonistes. Entre Sean et Jenny bien sûr, mais aussi envers Dory, ce fantôme qui hante leur vie depuis vingt ans. Et même avec Kieran, le frère de Jenny qui illustre trop bien la difficulté de vivre « après ».

Les livres d’histoire s’arrêtent aux accords du vendredi saint, qui marquent la fin du conflit nord-irlandais. Dark Shadow a le talent de montrer que l’histoire des gens ne suit pas le diktat de l’historien et que tout ne s’arrête pas parce que l’encre a séché.

Je pourrais parler des heures encore de la force de Sean et des moments de faiblesse où il m’a émue plus encore. De sa capacité à ouvrir son cœur sans complexe, sans retour en arrière, avec une puissance folle. À disserter sur le personnage tout en nuances de Jenny, solide et forte tête par certains aspects, impétueuse jusqu’à la déraison, mais aussi fragile et tourmentée et surtout d’une fidélité absolue aux valeurs qui sont les siennes et à ceux qui lui sont chers.

Je pourrais parler du personnage de Rose qui, quoi que secondaire en terme de mots, marque cette histoire du sceau des femmes de, droites dans leur résolution et soutiens indéfectibles de leurs hommes.

Je pourrais dire à Geny H David à quel point cette lecture se classe très très haut dans la liste des livres qui ont marqué mon coeur et mon esprit.

Je pourrais, …. mais je vais m’arrêter là et vous inviter à découvrir d’urgence ce livre, en n’oubliant pas cette réalité absolue.


« Parce qu’il faut que deux âmes sœurs se trouvent sous des étoiles contraires pour prouver au monde que la justice du cœur ne connaît pas la loi des hommes »

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