Attirance criminelle 2 de Jenn Guerrieri

Titre Attirance criminelle

Tome 2

Auteur Jenn Guerrieri

Éditeur Plumes du Web

Date de sortie 26 Septembre 2019

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Il y a quelques mois, j’ai découvert, au début de ma collaboration avec la prometteuse maison Plumes du Web, le premier tome d’Attirance criminelle (voir ici https://melimelodegwen.fr/index.php/2019/01/28/attirance-criminelle-tome-1-de-jenn-guerrieri/ ), une romance sombre qui, par bien des aspects, se rapproche d’une Dark romance, un genre dont à l’origine, je ne suis pas la plus grande fan. Mais, à l’instar de très nombreuses lectrices, je suis tombée sous le charme de la plume de Jenn Guerrieri et de son talent pour se glisser dans la tête de ses personnages, passant avec une aisance rare de la tête de l’innocente, mais pugnace Maya à celle du sombre Evann.

Leurs univers sont incompatibles. Leurs accrochages ont été orageux, leurs rapprochements houleux, et la fin du premier tome, pour frustrante qu’elle soit, donnait une impression d’achèvement, quoi que très frustrante pour moi.

**************************AVERTISSEMENT SPOILS **********************

La chronique à venir est à déconseiller pour ceux qui n’auraient pas lu le tome 1!

L’histoire commence en effet un an après qu’Evann s’est livré à la police.

Maya, pour sa part, a repris une vie « normale » ou presque. Ses parents ont tenu à l’installer dans une zone sécurisée. Elle a repris ses cours, s’inscrit au club de photographie, trouve en Kourtney une amie comme elle n’en avait jamais eue.

Côté pile, tout est rentré dans l’ordre.

Côté face, c’est une autre histoire. Bête curieuse pour certains, « garce d’Evann Black » pour d’autres, sa discrétion est difficile à préserver.

Quant à sa vie, elle est désespérément vide, vide de ce frère dont elle cultive, encore, le souvenir, vide de celui que tout en elle devrait repousser, oublier.

Oui, Maya n’arrive pas à se remettre d’Evann Black. Normal de ne pas « digérer » un kidnapping? Oui bien sûr, mais il n’y a pas que ça. L’homme lui manque. Sa noirceur, mais aussi les moments où elle a cru le toucher. Son univers, notamment les quelques liens qu’elle y avait noués, lui manquent.

Aussi, quand un soir elle croit en l’impossible, la réapparition d’Evann Black, sa vie bascule. Encore. N’importe qui, à sa place, serait effrayée, appellerait la police, se cacherait dans un abri antinucléaire ou migrerait sur Mars.

Pas Maya. Parce qu’Evann est, qu’elle le veuille ou non, une partie d’elle-même.

Commence alors un face à face psychologique qui m’a totalement embarquée. On n’est pas totalement dans le huis-clos, car les deux personnages interagissent, de gré ou de force, avec le monde extérieur et que certains regards, bienveillants ou inquiets, se posent sur leur étrange duo.

Mais ils retrouvent, un peu comme dans le premier volet, une forme d’intimité hautement inflammable.

Elle est explosive car, définitivement, Evann n’est pas un « gentil ». Les chapitres passés dans sa tête confirment son côté sale-gosse-tête-à-claques. Dès qu’il en a l’occasion, il aime à prendre l’ascendant sur l’Idiote, à lui montrer qui est aux commandes.

Mais plus encore que dans le premier volet où les rébellions de Maya passaient souvent pour des coups de tête irréfléchis, la jeune femme a pris de l’assurance, en tous cas dans sa façon d’affronter son démon. Elle commence aussi, grâce à ces qualités de coeur presque incongrues, à le cerner, à mesurer, en tous cas, ses réactions, à savoir quand elle peut le provoquer et quand il arrive au point de rupture. C’est que mieux que beaucoup, Maya sait quel danger peut représenter Evann… Vraiment?

Ce doute raisonnable, il assiège ceux ou celles qui découvrent le pot aux roses. Et je dois avouer que je les comprends. À voir les réactions de Maya, on ne peut s’empêcher de penser au syndrome de Stocholm. Quoique.

Tour à tour, le talent de l’auteure a décalé ma réaction dans des directions opposées. En effet, si le personnage de Maya, quoi que plus affûté, moins policé, et quelque part plus réfléchi, évolue dans une logique, c’est sur Evann que le travail de Jenn Guerrieri est colossal et pourtant très subtil.

Qu’on soit clair, Evann Black n’est pas un gentil (oh mon Dieu, il me casserait la figure rien que pour l’avoir pensé).

Mais ce tome creuse un aspect qu’on avait surtout supposé dans le premier volume, son humanité. Il ne s’agit pas de dédouaner le meurtrier, le sanguin, le sociopathe lunatique qu’est Evann. Non, il s’agit de donner les clefs. Des raisons qui l’ont fait dériver. Des motivations de ses choix. Des sentiments qu’il cache très très loin sous sa carapace d’inaccessible enfoiré.

Et dans cet exercice, avouons tout, Jenn est très très forte. Dans le premier volet, j’avais déjà dit que l’attraction physique qu’exerce Evann n’est pas un problème (malgré quelques délires capillaires que je vous laisse découvrir). J’oscillais alors entre l’envie de le haïr et un petit quelque chose plus positif.

L’auteure pousse la logique plus loin dans ce deuxième épisode. Par touches et nuances, lors de scènes clefs (que j’aimerais détailler avec vous, mais que je vais garder jalousement pour ne pas spoiler) on découvre un autre Evann. Tout aussi écorché, il montre qu’il possède d’autres talents que la mort et la souffrance, qu’il n’a pas choisi cette « carrière » par pur goût du sang et que sa conscience n’est peut-être pas si éloignée qu’il y paraît.

Il révèle surtout, presque malgré lui, des faiblesses. On en nourrit alors des sentiments plus ambigus à l’égard de l’homme aux yeux aussi noirs que le destin, et ils fournissent un moteur indéniable au livre.

Et il apparaît de plus en plus une sorte de malentendu entre le monde tel qu’il ressent Evann Black et celui qu’est, ou celui que pourrait être (ou qu’aurait pu être) Evann Black. Il n’y a qu’à voir ses échanges avec Franck (qui est Franck me direz-vous? Question à cent points!) pour mesurer tout ce paradoxe.

Tant qu’on reste en dehors de ce dilemme, on ne peut être qu’effrayé par le sombre meurtrier. Est-on pour autant rassuré lorsqu’on le prend à bras le corps? Pas sûr, mais la position de Maya devient alors plus compréhensible.

Elle m’a davantage parlé, en tous cas que ce que je craignais dans le premier tome. Elle offre aussi de très belles pages où l’affrontement devient quelque chose d’autre. L’auteure y déploie alors d’autres facettes de son talent multiformes et j’y ai été sensible.

Il faut dire que, dans ce tome encore, les situations décrites sont multiples. La plupart parlent de confrontations, entre les héros ou avec le monde extérieur. Plusieurs évoquent de la violence, de la violence de rue, la violence sociale entre les étudiants, autour des premiers amours et de leur trahison. Tout autant parlent de passions, qu’il s’agisse de passion sentimentale ou du goût de l’héroïne pour la photographie, qui donne lieu à des moments magiques.

Mais il y a aussi toute une dimension anxiogène liée au secret, à la dissimulation. Impossible pour Maya de se révéler telle qu’elle est devenue, telle qu’elle voudrait être, sans être incomprise, sans peiner ceux qui tiennent à elle, sans être jugée, ou même pire en danger.

En fait, cette nécessité de se dissimuler concerne la plupart des protagonistes. Personne ne peut vraiment être qui il souhaite, au risque de tout mettre en péril.

Et ce n’est pas le cliffhanger, haletant de simplicité, qui dira l’inverse, lui qui m’a laissée impatiente de connaître la fin de cette série prometteuse dans laquelle je m’attends à tout, animée d’une seule certitude, celle de ne pas être déçue.

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